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Les condisciples III
Ils n’y étaient pas, n’y sont pas, n’y seront pas…
en tant qu’invité•e•s

mardi 25 juin 2013, par SCI Marcos

Juin 2013.

Aux adhérent•e•s à la Sexta au Mexique et dans le monde
Aux étudiant•e•s de la petite école zapatiste

Compañeros, compañeroas, compañeras,

Ne seront pas vos camarades de classe à la petite école, parce que nous ne les invitons pas, les gens suivants :

Les législateurs qui ont formé la Commission de concorde et de pacification (Cocopa) dans la période 1996-1997. Même si ça leur aurait été utile de se rendre compte qu’ils ne s’étaient pas trompés avec leur initiative pour la reconnaissance constitutionnelle des droits et de la culture indigènes, celle-là même qui a été trahie par tous les partis politiques, le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire.

Les législateurs de la Cocopa actuelle. Même si ça les aurait aidés à trouver où est la porte pour la réactivation du dialogue avec l’EZLN.

Les présidents des partis politiques enregistrés officiellement (PRI, PAN, PRD, PVEM, PT, MC et NA). Parce que nous n’avons pas d’antiacides suffisants pour soulager la rogne que ça leur causerait de mettre en évidence tout ce qu’on peut faire non seulement sans les partis politiques, mais malgré eux.

Les présidents des bureaux des chambres législatives et les coordinateurs des fractions parlementaires. Même si ça leur aurait été utile de constater ce que la contre-réforme de loi indigène qu’ils maintiennent n’a pas pu empêcher.

Le ministère de la Défense nationale, le ministère de la Marine, le service de renseignement Cisen, le ministère de la Justice, la Commission nationale de sécurité, le ministère du Développement social, la Cour suprême de justice de la nation. Même s’ils avaient pu ainsi confirmer leurs rapports de renseignement qui leur disent que le niveau de vie des communautés indigènes zapatistes est en train de s’améliorer de façon significative, malgré leurs travaux de contre-insurrection, leur soutien à des groupes paramilitaires, et le traitement policier qu’ils infligent à une lutte juste et légitime. Et, en outre, ils auraient pu constater, de première main, la persistance de ce qu’ils ont tenté de détruire avec tant d’acharnement : l’autonomie indigène.

Le Département d’État nord-américain, la CIA, le FBI. Même si ça les aurait aidés à comprendre leurs échecs répétés… et ceux à venir.

Les différentes agences d’espionnage qui se languissent d’ennui à San Cristóbal de Las Casas (Chiapas), et dont le seul souci est d’encourager les bruits de chiotte qui pullulent parmi les ONG locales.

Le Commandeur, celui qui en réalité les dirige tous, devant qui ils s’inclinent et qu’ils adulent. Même s’il avait tout juste frémi en constatant que ce cauchemar récurrent dont il souffre a des allures de réalité.

Ils n’y ont pas été, n’y sont pas et n’y seront pas comme étant nos hôtes.

En revanche, ils ont été là, y sont et y seront comme étant nos persécuteurs, comme étant ceux qui cherchent la façon de nous détruire, de nous faire plier, de nous acheter, de nous faire capituler.

Ils seront en train de nous espionner, de nous surveiller, de toujours nous maudire, comme aujourd’hui, comme hier, comme il y a dix, vingt, trente, cinq cents ans.

Nous ne les invitons pas non seulement parce que notre plan d’études n’inclut pas de groupes à apprentissage égal à zéro, ou pour ne pas encourager le harcèlement dont ils feraient l’objet de la part des autres étudiants (oui, je sais, c’est vraiment dommage), ou parce que nous avons de meilleures façons de perdre du temps.

Nous ne les invitons pas parce que, de même que nous, nous n’allons pas arrêter de lutter et de résister, eux, ils ne vont pas arrêter de nous mépriser, de tenter de nous exploiter, de nous réprimer, d’essayer de nous dépouiller de ce qui est à nous, de nous faire disparaître.

De même que nous, femmes et hommes, n’allons jamais apprendre la langue de l’argent, eux ne vont jamais apprendre à respecter celui, celle, qui est différent•e.

Et surtout, nous ne les invitons pas parce que eux et qui, en réalité, les commande, ne vont jamais comprendre pourquoi, au lieu de mourir, nous vivons.

*

De sorte que, rien à faire, vous ne compterez pas parmi vos condisciples d’aussi « illustres » personnes. C’est pourquoi on ne vous verra pas dans les bulletins d’information de la presse écrite, de la radio ni de la télévision, qu’il n’y aura pas de tables de débat, ni de savantes analyses. C’est-à-dire que, comme dirait l’autre, l’air sera propre. Et la terre, celle qui nous a vus naître et nous nourrit et fait grandir, remerciera du digne pas qui la parcourt : le vôtre.

Allez. Salut et liberté, le pas de celles et ceux d’en bas est le bienvenu, comme est bienvenu leur cœur.

Depuis les montagnes du Sud-Est mexicain,
SupMarcos
Mexique, juin 2013.

Óscar Chávez et Los Morales désignant les chupacabras  [1]
qui, comme on le voit, sont toujours les mêmes.

Guillermo Velázquez et Los Leones de la Sierra de Xichú,
accompagnant Óscar Chávez dans ce long Pleito entre el peso y el dólar.

Traduit par El Viejo
le 22 juin 2013.

Source du texte original :
Enlace Zapatista

Notes

[1Pour qui n’aurait pas lu, ou aurait oublié, « Eux et nous III », on reproduit ici la note sur les chupacabras :
Le chupacabras (littéralement : suceur de chèvres) est la dernière-née des créatures maléfiques genre vampires, apparue au début des années 90 du siècle dernier dans les Caraïbes, puis en Amérique dite latine, NdT.

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