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Communiqué de la Commune autonome de San Juan Copala, 8 juin 2010

La Commune autonome de San Juan Copala fait connaître sa position sur ce qui s’est passé le 8 juin 2010 pour la Caravane « Bety Cariño et Jyri Jaakkola »

mercredi 9 juin 2010

Bulletin d’information, 8 juin 2010

Aux organisations sociales, civiles, politiques, universitaires, indigènes, solidaires
et sœurs qui constituent cette caravane appelée « Bety Cariño et Jyri Jaakkola »,
Aux médias nationaux et internationaux,
Aux organisations de défense des droits humains,
Aux organisations et collectifs internationaux solidaires,
À l’Autre Campagne,

Aujourd’hui 8 juin, la caravane humanitaire « Bety Cariño et Jyri Jaakkola » s’est vue dans l’obligation de ne pas entrer à San Juan Copala et de laisser les plus de trente tonnes de vivres et d’aide humanitaire qu’elle voulait y livrer parce que les gouvernements de l’État et de la Fédération, en complicité avec ce groupe de criminels qui maintiennent le siège paramilitaire autour de San Juan Copala, ont décidé de dresser un nouvel encerclement pour empêcher la mission d’atteindre son objectif.

Le gouvernement de l’État, au travers de sa police et de la ministre de la Justice locale, a tendu un nouveau siège « gouvernemental » pour protéger l’Ubisort et empêcher cette caravane d’entrer à San Juan Copala pour remettre l’eau et la nourriture qu’on a pu collecter ces dernières semaines ; le nouveau siège imposé à présent à Copala dispose de la présence ouverte et publique de policiers de l’État et de la Fédération qui, au lieu de garantir la sécurité de cette mission et d’être présents à La Sabana pour assurer la libre circulation et la non-agression, ont décidé de protéger les assassins en alléguant que « les conditions n’étaient pas réunies », qu’« on avait entendu des coups de feu », et dans le cas de la ministre de la Justice qu’il « fallait parler avec l’Ubisort et les inviter à la caravane », et que seulement ainsi pouvait être garanti le passage vers San Juan.

Selon l’information interne de nos communautés que nous avons eue le long du trajet, un groupe nombreux de femmes et d’enfants de la communauté de La Sabana, membres ou sympathisantes de l’Ubisort, était en train de bloquer la route qui descend vers San Juan Copala, avec la claire intention de provoquer une agression de la part de la caravane ou de certains de ses membres ; après ce barrage de femmes et d’enfants se trouvait un autre barrage de roches de grande taille gardées par des hommes armés, peut-être les mêmes hommes armés qui ont assassiné nos compañeros Bety Cariño et Jyri Jaakkola, et à cause desquels on a tenté aujourd’hui de briser l’encerclement paramilitaire.

La décision de la coordination de la Caravane, composée de compañeros qui font partie des autorités de notre Commune autonome, a été d’avancer un peu plus loin que la communauté d’Agua Fría Copala, et d’analyser les conditions de sécurité à partir de là, car depuis Juxtlahuaca la police de l’État et la ministre de la Justice locale nous avaient fait savoir qu’elles déclinaient toute responsabilité s’il se passait quelque chose, et que ce serait de la responsabilité de la Caravane et de ceux qui y appelaient.

Nous avions pensé que la présence de la police fédérale visait à garantir notre sécurité, mais ce n’a pas été le cas, ils étaient là pour nous dissuader d’entrer à San Juan et pour nous dire qu’ils avaient entendu des coups de feu et que le mieux était de ne pas y entrer.

Ces coups de feu qu’ont entendus les policiers fédéraux, ce sont ceux qu’on entend quotidiennement et toute la journée à San Juan Copala, ce sont les coups de feu qui dévastent la communauté, qui ont réussi à faire partir des familles entières, et qui ont dissuadé d’y entrer les médecins, les instituteurs et les vendeurs de produits divers, imposant un état de siège par la voie des armes et de la violence.

Quelques personnes et organisations se sentiront sans doute déçues ou fâchées de ce qui s’est passé aujourd’hui ; nous, nous sommes pleins de rage et d’indignation, mais cette rage qui est dans nos cœurs d’avoir été empêchés d’arriver à San Juan Copala nourrit notre esprit pour continuer à nous battre : l’encerclement paramilitaire doit être brisé, cela n’a pas été possible aujourd’hui mais nous continuerons à essayer ; aujourd’hui nous n’avons pas subi une défaite, nous avons seulement décidé de ne pas exposer davantage de vies face à ces assassins impunis et de continuer à chercher les manières pour que les habitants de San Juan Copala puissent continuer à résister encore à cette lâche agression ; nous espérons qu’ils comprendront et respecteront cette décision, si douloureuse ou étrange qu’elle leur paraisse.

Il a été clair que ni le gouvernement de l’État ni celui de la Fédération n’ont la capacité et la volonté de contrôler et châtier ce groupe criminel et paramilitaire, ce qui se passe dans la région n’intéresse aucun des deux gouvernements, ils n’arrêtent ni ne châtient les assassins, et maintenant ils les protègent même avec un encerclement policier et prétendent que les autorités de la Commune autonome et les membres de la caravane dialoguent avec eux et « leur demandent la permission » pour traverser le territoire qu’ils contrôlent par les armes et la menace.

Si le gouvernement de l’État et celui de la Fédération ne peuvent garantir aux habitants de San Juan Copala la nourriture et les médicaments, la société civile avec le soutien de la communauté internationale devra chercher les mécanismes pour y parvenir, et les instances internationales joueront un rôle très important face à la carence totale de l’État à tous ses niveaux de gouvernement.

La caravane est composée par des personnes aux idéologies politiques les plus diverses, et par des personnes qui, en d’autres circonstances, n’auraient jamais pu marcher ensemble. Cette capacité de cohabitation et de respect montrée lors de la caravane est pour nous un succès, car elle n’a pu être engendrée que par l’humanité et l’affection envers nos sœurs et nos frères triquis qui se trouvent privés de leurs droits fondamentaux et en danger d’être assassinés à tout moment. Merci à toutes et à tous.

Après tout cela, la Commune autonome de San Juan Copala fait entendre sa voix à travers ce bulletin et signale que :

1. Les aliments et vivres que cette caravane allait livrer seront gardés à Huajuapan de León jusqu’à ce qu’on trouve la meilleure manière de les faire entrer et de les remettre aux familles de San Juan Copala.

2. À partir de demain, les autorités de notre Commune autonome entreront formellement en contact avec le Comité international de la Croix-Rouge ainsi qu’avec les diverses instances des Nations unies au Mexique, pour demander leur intervention dans l’envoi et la réception des presque 35 tonnes d’aide qui ont été réunies pour cette caravane.

3. Nous ferons pression et nous exigerons que le ministère fédéral de la Justice donne des résultats immédiats sur l’enquête concernant les faits du 27 avril, car par son inactivité il se fait complice des assassins paramilitaires.

4. Si nous ne pouvons pas livrer dans les semaines qui viennent l’aide humanitaire rassemblée aujourd’hui, nous appellerons à une nouvelle caravane humanitaire composée seulement de femmes de tout le pays et du monde solidaire, comme un geste de solidarité et de soutien à nos compañeras qui survivent aux conditions inhumaines imposées à San Juan Copala.

5. Nous exigeons la démobilisation et le désarmement immédiats du groupe paramilitaire Ubisort protégé par le gouvernement d’Ulises Ruiz Ortiz et par des politiciens liés au PRI de l’État d’Oaxaca.

6. Nous invitons les organisations civiles et sociales nationales et internationales solidaires avec notre cause à rester informées des actions et communiqués émis par la Commune autonome de San Juan Copala pour briser l’encerclement paramilitaire et obtenir la justice pour notre peuple.

Cette caravane rentre demain à Mexico pour informer toutes les organisations, les compañeros et compañeras solidaires qui se sont mobilisés pour que cette caravane puisse se réaliser ; nous les attendons sur la Grand-Place de la ville de Mexico à 15 heures pour nous accueillir.

L’encerclement doit être brisé, peu à peu il s’use, les gouvernements ne peuvent maintenir davantage les assassins paramilitaires dans l’impunité, San Juan Copala doit revenir à la normale et exiger que les droits des peuples indigènes soient respectés.

Commune autonome de San Juan Copala
Casimiro Martínez Aguilar

Traduit par el Viejo.

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