Face aux attentats meurtriers du 13 novembre, la réponse immédiate de l’État français a été la proclamation de l’état d’urgence, d’abord pour douze jours, puis pour trois mois (vote à la quasi-unanimité du Congrès). Censé faciliter ou permettre, par des mesures d’exception, l’arrêt des attentats et la mise hors d’état de nuire de leurs auteurs, cet état d’urgence multiplie les mesures liberticides et, dans la lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, nous nous confrontons à certaines de ses conséquences.
Les fichages réalisés par la police dans les mouvements de lutte servent désormais à des mesures répressives sans contrôle d’un juge ou sans procès. Des personnes ont été perquisitionnées à leur domicile et assignées à résidence pour avoir participé à une manifestation, distribué des tracts liés à la lutte de Notre-Dame-des-Landes, ou participé à l’accueil du convoi Cap sur la COP à Paris. D’autres se voient bloquées aux frontières ou reçoivent des obligations de quitter le territoire. Au-delà, c’est l’ensemble des manifestations de rue prévues lors de la COP21 qui a été interdit et de nombreuses autres assignations à résidence ont été délivrées à des personnes ayant bravé l’interdiction.
Sous prétexte de protéger la population, l’État cherche à juguler et à dissuader toute contestation (interdiction des rassemblements et manifestations, liberté de s’exprimer)... mais n’annule pas les marchés de Noël ou les rencontres sportives dans de grands stades. On nous somme d’adhérer à l’union sacrée de gré ou de force : les « bons Français » tous unis avec leurs politiques, qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition.
Cette volonté d’enterrer des libertés fondamentales au nom de la sécurité ne concerne pas que les personnes en lutte mais touche de plein fouet les populations les plus discriminées, comme les personnes de confession musulmane ou les migrants qui fuient les fondamentalismes religieux et les conséquences de l’exploitation des pays du Sud par les États occidentaux.
Ce régime pourrait bien ne pas être que passager. Tout comme nous avons dû nous « habituer » à Vigipirate, ou à la généralisation du fichage ADN , il est maintenant quasi certain que nous allons voir les mesures soi-disant exceptionnelles de l’état d’urgence se pérenniser et s’inscrire dans la Constitution.
Malgré l’état d’urgence, le convoi tracto-vélo du mouvement anti-aéroport s’est rendu jusqu’en Île-de-France, faisant jour à après jour reculer les frontières de l’interdiction qui lui était faite.
Il nous semble crucial de continuer à faire vivre et partager l’espoir politique qui se construit depuis Notre-Dame-des-Landes : celui qu’il soit possible d’arrêter ici et maintenant les projets nuisibles et imposés, celui qu’il soit possible d’inventer ici et maintenant d’autres manières de vivre, d’habiter, de produire ou de cultiver.
En ces temps sombres, il nous semble plus nécessaire que jamais de partager notre force collective. Ne nous laissons pas bâillonner, continuons à manifester et à contester dans l’espace public.
Des occupant·e·s de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes
ACIPA, COPAIN 44, ATTAC 44, EELV
Source : zad.nadir.org