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Notes anthropologiques (XXXVII)

lundi 3 juin 2019, par Georges Lapierre

Et si nous parlions encore une fois d’argent ? (I)

L’argent comme monnaie d’échange

« L’homme comme être qui, non seulement vit en société (comme les autres animaux sociaux), mais produit de la société pour vivre. »
Maurice Godelier, L’Énigme du don

Le sens du mot monnaie est ambigu, il peut désigner tout objet permettant des échanges : des couvertures, des nattes, des fèves de chocolat ou tout autre objet pouvant servir de moyen d’échange. Le mot est pris alors dans le sens général de « monnaie d’échange ». Cette monnaie d’échange, que l’on pourrait qualifier d’« universelle » est reconnue comme telle par les partenaires de l’échange soit qu’elle se trouve utilisée sous cette forme dans une société donnée, et de ce fait reconnue par tous les membres de ladite société, soit qu’elle ait été acceptée provisoirement comme telle après entente préalable entre les partenaires d’un échange. Nous voyons bien que la « monnaie d’échange » n’a rien d’universel et que c’est un abus de langage de parler à son sujet de « marchandise universelle » ou d’« une marchandise qui contiendrait toutes les marchandises », ce serait penser notre société (ou notre civilisation) comme universelle, comme la seule possible, comme unique. La monnaie d’échange est conventionnelle, c’est une convention sociale en relation avec une société bien définie, ou alors une convention établie provisoirement. Prétendre, par exemple, que l’argent est la monnaie universelle c’est se soumettre à l’impérialisme qui est le propre de notre civilisation partie à la conquête de l’univers. L’argent serait une monnaie parmi d’autres. Une monnaie qui est propre à notre civilisation et reconnue par elle. En faire la monnaie universelle et confondre l’argent et la monnaie, c’est prendre le parti de notre civilisation et apporter une confusion qui nous donne un certain avantage.

Cependant les anthropologues, les sociologues et les historiens n’hésitent pas à confondre les deux, l’argent et la monnaie, et ils parlent de la naissance de la monnaie quand il s’agit en vérité de la naissance de l’argent, c’est-à-dire d’une certaine conception de la monnaie, la nôtre, l’idée que nous nous faisons de la monnaie. Les économistes et les propagandistes aussi, mais c’est une autre histoire ! L’argent n’est pas n’importe quelle monnaie et il ne s’agit pas de le confondre avec les moyens d’échange traditionnels. Il serait plus juste de parler de la naissance de la monnaie d’argent ou d’or ou encore, plus précisément de la naissance de la monnaie sous la forme de pièces d’or et d’argent. Et cette monnaie sous la forme de pièces d’or ou d’argent est utilisée au commencement de notre histoire pour des échanges commerciaux dans une zone d’influence assez bien délimitée autour du bassin méditerranéen. Cette zone d’influence de ce que nous pourrions définir assez justement comme la civilisation de l’argent va s’étendre progressivement comme une tache d’huile sur le monde entier.

Confondre la monnaie d’échange avec l’argent est un choix idéologique, c’est penser qu’il existe une continuité et un progrès, que rien ne vient rompre, entre un passé lointain, originel, et notre présent. Notre civilisation se trouverait ainsi à la pointe d’une évolution progressive des échanges entre les hommes qui, partie d’une pratique archaïque, et un peu incongrue, pour ne pas dire irrationnelle, du don et du don en retour, par le biais de toutes sortes d’objets conventionnels (peau, couvertures, blasons de cuivre, haches de jade, cauris, barres de sel, etc.), finirait par aboutir à l’échange marchand dans lequel la valeur de chaque chose échangée peut être définie objectivement et où il n’existe qu’une seule monnaie d’échange à valeur universelle, reconnue par tous : l’argent. Je dois reconnaître qu’un tel point de vue, s’il donne avantage à notre civilisation chrétienne, occidentale et marchande, simplifie tout de même les transactions de marchandises. Quant au caractère d’objectivité que des gens qui se nomment économistes s’efforcent de donner à cet échange marchand, s’il est obstiné, il reste tout de même peu visible et peu évident. Pourtant c’est bien ce que cherche à faire Karl Marx en définissant la valeur d’une marchandise en fonction de la quantité de travail socialement nécessaire pour la produire. Cette volonté de définir objectivement la valeur et de faire ainsi de l’économie une science objective (faisant justement l’économie du sujet) accompagne le désir de placer notre civilisation à l’abri de toute critique. Le retour au sujet, c’est-à-dire à l’être humain et à ses motivations profondes et parfois irrationnelles — le retour du subjectif au centre de notre appréhension de la réalité —, marque bien le réveil d’une véritable critique et de la seule véritable critique à mes yeux de notre civilisation marchande.

L’échange marchand, qui utilise l’argent comme monnaie d’échange, prétend faire l’économie du sujet pour se mouvoir uniquement dans la sphère de l’objectivité. Effectivement le marchand se refuse de se présenter comme sujet dans un échange entre deux sujets qui est le propre du don et du don en retour, et qui définit ce que j’ai appelé l’échange de type cérémoniel. Si le marchand ne s’implique pas comme sujet dans l’échange, il est tout de même bien présent en tant que personne ; son escamotage comme sujet est un leurre ou un piège, un tour de passe-passe. Il disparaît de l’échange dans lequel il ne s’engage pas, ou fait mine de ne pas s’engager, pour réapparaître sur un autre plan, celui du profit personnel, de l’intérêt particulier. Le marchand ne s’engage pas comme sujet pour mieux manipuler l’échange à son profit. Ce qui était du domaine public passe dans le domaine privé. L’échange marchand prend de la hauteur par rapport à l’échange cérémoniel, il échappe au public, il se libère du public. Le sujet (en l’occurrence le marchand) abandonne la dimension sociale qui aurait pu être la sienne dans l’échange cérémoniel pour se trouver réduit à l’ego. L’activité marchande, loin de se dérouler dans un monde objectif dont le sujet serait absent comme le voudraient les économistes, se déroule dans un monde entièrement subjectif mais dans lequel le sujet se trouve réduit à l’ego.

Pour moi, il n’y a pas continuité entre un mode d’échange traditionnel et le mode d’échange marchand que nous connaissons, mais discontinuité et rupture. Cette position peut paraître aussi idéologique que la première. Je l’accorde. C’est un parti pris, celui de la subjectivité, opposé au parti pris de l’objectivité. L’argent n’est pas une monnaie comme les autres, il est né d’une appropriation et d’une exclusion. Nous cherchons à donner à l’argent une valeur qui se voudrait objective, indépendante de la subjectivité des uns et des autres alors même que l’argent est un état d’esprit, qu’il est porteur d’un état d’esprit. Ce n’est pas la pièce elle-même, en argent, en or ou en laiton, qui contiendrait cet état d’esprit, mais bien son mode d’utilisation. L’argent en tant que monnaie d’échange draine avec lui un état d’esprit et cet état d’esprit lui colle à la peau ou à la pièce, si je puis dire. L’argent est la monnaie d’échange dominante dans notre civilisation et cette monnaie est utilisée dans un certain état d’esprit bien particulier et cet état d’esprit bien particulier détermine un mode d’échange tout aussi curieux et spécifique que l’on appelle l’échange marchand.

Il s’agit donc de mettre en avant un état d’esprit et non la chose elle-même. L’argent peut être utilisé dans un autre état d’esprit que celui qui a cours généralement, il peut être donné avec largesse, joué à la roulette ou aux cartes, il peut être volontairement détruit, l’or des pirates peut être dilapidé en une nuit d’orgie ou enseveli dans des terres inaccessibles. Il devient dépense, don, générosité, débauche, fête, il est richesse humaine, il est potlatch, il est l’idée de richesse, la substance qui irradie et nous emporte, le loto, la roue de la fortune, entrer dans la ronde… Inversement, toute autre monnaie d’échange peut être utilisée selon l’état d’esprit propre à l’échange marchand. Nous avons eu l’occasion de citer quelques exemples d’utilisation de monnaies d’échange plus traditionnelles pour des transactions commerciales faites dans un état d’esprit marchand. Il nous arrive de détourner à des fins qui nous sont propres les monnaies d’échange utilisées par les sociétés avec lesquelles nous commerçons. Dans les notes précédentes [1], j’ai évoqué les perles des colliers wampum des Algonquins utilisées par les marchands hollandais comme moyen d’échange : des peaux contre des perles. Ces peaux étaient ensuite revendues contre de l’argent sur le marché européen avec un bénéfice important. Nous pouvons aussi inventer d’autres moyens d’échange comme la verroterie, dans le même but : échanger avec des sociétés ou des peuples qui ne connaissent pas encore, ni ne reconnaissent, l’argent comme monnaie d’échange. Il s’agit pour les partenaires de l’échange de reconnaître l’intérêt, pour eux, du moyen d’échange utilisé. C’est que l’argent véhicule le plus souvent un état d’esprit particulier qui est celui du profit et du calcul. L’aspect désintéressé mis en avant dans le don et qui consiste surtout à laisser l’initiative du retour au partenaire a disparu pour céder la place à l’intérêt bien compris du marchand qu’il pense avoir évalué et calculé objectivement.

C’est bien le subjectif, sous la forme d’une pensée spéculative, qui détermine et fixe froidement la valeur de la chose échangée et exigée en retour. Ce côté calculateur de l’échange marchand peut bien lui conférer une aura d’objectivité, cela ne signifie pas qu’il est objectif en lui-même. Le marchand est calculateur car il spécule sur le profit qu’il espère tirer de l’échange, il ne se laisse pas aller à donner libre cours à d’autres désirs que celui du profit. Il met de côté l’ambition personnelle, la recherche du prestige lié à l’histoire de l’objet, l’antiquaire, par exemple, met en vente des objets rares, qui ont un passé et une histoire et c’est bien ce passé, cette histoire, cette « antiquité », qui attire le collectionneur prêt à débourser une somme d’argent conséquente pour un objet qu’il suppose prestigieux ; le marchand antiquaire se joue de cette convoitise qu’il juge subjective et dont il entend tirer profit, ce qui l’intéresse, c’est sa marge bénéficiaire. Le marchand n’est pas non plus mu dans son échange par l’idée de s’intégrer à une collectivité, de poser les bases d’une alliance comme le ferait un primitif ; il fait abstraction de tout ce qui l’attacherait à la vie sociale. Cet attachement à la vie sociale, et qui est en général qualifié de subjectif, lui est étranger et il n’en tient pas compte dans son « marchandage ».

Tout cet aspect social qui serait la motivation profonde d’un sujet pris dans son envergure sociale — et qui, pour cette raison, peut être qualifié de subjectif — n’est pas absent de sa spéculation, mais il est mis de côté et n’intervient pas directement. Le marchand ne retient que l’idée de bénéfice qu’il retirera de la transaction. Ce bénéfice, qui se mesure en argent, marque la valeur acquise par l’objet. Le monde du marchand est celui de la valeur et la valeur est la mesure toute subjective, liée à la pensée spéculative, de l’activité sociale engendrée par l’objet d’échange. C’est l’argent qui le fera socialement riche et tout ce dont il a fait abstraction au cours de la transaction lui reviendra indirectement grâce à l’argent. Le subjectif, tout ce qui se trouve lié à la vie sociale, n’est plus vécu directement. La pensée spéculative, qui reste quoi qu’il en soit une pensée subjective, n’est plus tournée vers la vie sociale, mais en direction de l’argent, qui devient le but visé, et c’est lui seul — l’argent, la chose même — qui fait retour à la société. L’argent n’est que l’apparence prise par la valeur, l’activité générique devenue mesurable et visible (mesurable parce que visible). Devenue mesurable et visible, l’activité générique sous l’apparence de l’argent est devenue l’objet véritable de l’activité du marchand.

Par ces exemples nous nous rendons compte que c’est bien un état d’esprit qui préside à l’échange et qui le définit, ce n’est pas la monnaie d’échange elle-même. Nous pouvons seulement avancer que la monnaie utilisée reflète généralement l’esprit dans lequel est pratiquée la transaction, dans la mesure où cette monnaie d’échange a une tradition, toute une histoire qui la rattache par ses origines à une manière d’être, à un mode de vie en collectivité, au mode selon lequel les échanges sont pratiqués dans une société. Au sujet de l’argent (comme au sujet d’autres monnaies d’échange), nous devrions préciser son origine et nous demander aussi dans quel esprit s’opéraient les échanges dans le bassin égéen avant son apparition au VIe siècle avant notre ère dans la cité de Kolonna dans l’île d’Égine, la première cité grecque à frapper monnaie. Nous pouvons avancer sans grand risque de nous tromper que le commerce, l’échange de biens, a toujours existé non seulement entre clans et tribus à l’intérieur d’un peuple, mais aussi entre les peuples. Quelles formes prenaient ces échanges ? Dans quel état d’esprit se faisaient-ils ?

Les ethnologues qui étudient les sociétés primitives abordent généralement ce sujet et les études depuis Les Argonautes du Pacifique occidental, de Malinovski, se sont multipliées. Sans avoir nécessairement le caractère de rivalité et de surenchère du potlatch, c’est tout de même le sens du don qui prévaut et qui structure, construit et règle les relations à l’intérieur d’un peuple et aussi entre les peuples [2]. Il est à mon sens remarquable que ces échanges s’ils se font par l’intermédiaire d’un chef, d’un grand homme, d’un aîné ou d’un big-man, restent toujours des échanges collectifs, concernant et impliquant soit la lignée, soit le clan, soit la tribu, c’est-à-dire des communautés de pensée constituées et créées par les relations d’échange que les membres de ces dites communautés ont entre eux. J’avais déjà relevé dès les premières notes anthropologiques la remarque faite par Marcel Mauss à ce sujet : « Le chef se confond avec son clan et celui-ci avec lui : les individus ne se sentent agir que d’une seule façon » (Mauss, Essai sur le don). C’est sans doute ce type d’échanges et de commerce qu’ont pu connaître les peuples autochtones au cours du néolithique. Au cours de la civilisation palatiale, minoenne puis mycénienne, je me demande si la présence des États du Moyen-Orient comme l’Empire égyptien n’a pas transformé l’esprit des échanges en Méditerranée comme un aimant modifie les ondes magnétiques.

La plupart du temps les anthropologues cherchent à élever l’anthropologie au statut de science, en cela ils sont comparables aux économistes qui cherchent à élever l’échange au rang de science objective. L’anthropologie est seulement notre fil d’Ariane que nous suivons obstinément dans le vain espoir de sortir de notre labyrinthe. La subjectivité est notre labyrinthe et la sortie ne donne pas sur l’univers, mais sur nous-mêmes, elle n’est qu’un retour à l’univers de la subjectivité et, au mieux, de la spiritualité. La pensée dite positive, en apportant une séparation entre le sujet pensant et la réalité, nous éloigne de cette connaissance de soi qui fusionne avec celle du soi. Et cette connaissance de soi et du soi n’est pas (et ne peut être) une connaissance objective, elle est une connaissance pratique qui se confond avec l’acte pratique de communication. Et cette connaissance pratique se confondant avec l’acte pratique de communication à l’intérieur d’un peuple, se confondant avec la vie sociale, avec ce qui constitue le soi de chacun est une connaissance spirituelle et peu importe la manière par laquelle s’exprime cette connaissance.

À force de faire des tris, nous finissons par perdre de vue ce que Marcel Mauss nomme, dans une heureuse intuition, « le système des prestations totales ». Nous nous éloignons de cette totalité que représente la vie sociale, c’est-à-dire l’ensemble des prestations que nous nous devons les uns aux autres et qui non seulement constituent la vie sociale mais nous élèvent à la qualité d’êtres humains. L’ensemble des obligations et des prestations multiples en générant la vie sociale fondent le genre et nous constituent comme sujet générique. Nous naissons de l’activité pratique de communication et le soi, la connaissance révélée de soi (confondu avec le soi qui sourd de la vie sociale), reste inséparable de l’activité pratique des échanges. C’est bien sur ce plan que s’insère la religion, apportant une ouverture sur le soi confondu avec l’activité pratique de communication. Une telle conception de l’être reste ancrée dans la mentalité des femmes et des hommes qui n’ont pas encore entièrement coupé le cordon ombilical qui les attache à la vie en société.

L’activité marchande a perturbé au plus haut point cette relation entre le sujet social (l’être humain) et l’activité pratique de communication. Elle apporte un éloignement comme si l’activité pratique s’était détachée de l’être, comme si la vie sociale se trouvait séparée du sujet social, comme si le sujet pouvait exister indépendamment de la société et la vie sociale indépendamment du sujet. Il n’en est rien et nous avons toujours affaire à une totalité mais les éléments qui constituent cette totalité sont devenus étrangers les uns aux autres — alors qu’ils ne le sont pas réellement. C’est une situation paradoxale. Et le paradoxe est un défi à l’intelligence.

Ce que nous appelons d’un terme générique l’argent est la monnaie d’échange que nous utilisons dans nos transactions commerciales. Cette équivalence entre la valeur estimée de la marchandise et la valeur reconnue de l’argent est fixée au préalable entre les partenaires réelles de l’échange, et les partenaires véritables de l’échange marchand sont les marchands eux-mêmes, ne l’oublions pas. L’argent en tant que monnaie d’échange est la marchandise conventionnelle qui est capable de se convertir en n’importe quelle autre marchandise et de s’échanger ainsi dans un rapport d’équivalence de valeurs. La valeur apparaît dans ce rapport d’équivalence entre toutes les marchandises que fait naître l’argent. L’argent comme un produit chimique a la capacité de révéler, de précipiter et de cristalliser, la valeur, de rendre apparente la pensée spéculative qui se trouve à l’origine de l’activité générique. Et cette pensée spéculative qui se trouve à l’origine de l’activité sociale est la pensée du marchand. L’argent rend visible la pensée qui se trouve à l’origine de l’activité sociale, il rend visible la pensée du marchand. Et cette pensée ayant pris l’apparence de l’argent est effective, elle est la pensée véritable qui se trouve à l’origine de l’activité pratique de communication.

L’argent est la forme prise par l’idée, il est l’idée qui se fait apparente ; il est à la fois l’idée capitalisée, devenue visible, et le moyen par lequel les marchandises s’échangent entre elles — ce que l’on appelle la monnaie d’échange. Il est à la fois l’idée à l’origine de l’activité générique et la pensée pratique, le moyen par lequel l’idée se réalise. L’argent est l’idée qui devient le but de la pensée. Il est à la fois l’idée capitalisée (le capital) et la pensée qui la reproduit (l’activité spéculative du marchand). Avec l’argent, nous retrouvons la même totalité qui lie la pensée à l’idée et qu’avait signalée Marcel Mauss au sujet de la société dans sa forme originelle et dans laquelle l’être humain comme être pensant se trouvait engagé directement dans l’activité générique de reproduction de la vie sociale. Ce rôle semble dévolu désormais à l’argent.

Marseille, mai 2019
Georges Lapierre

Notes

[1Cf. Notes anthropologiques XXIX, XXX, XXXI.

[2« Toute vie tribale n’est qu’un constant “donner et recevoir” ; toute cérémonie, tout acte légal et coutumier n’est fait qu’avec un don matériel et un contre-don qui l’accompagnent ; la richesse donnée et reçue est l’un des principaux instruments de l’organisation sociale, du pouvoir du chef, des liens de la parenté par le sang et des liens de la parenté par mariage », a écrit Malinowski dans Les Argonautes du Pacifique occidental.
À cette constatation, Mauss ajoute une notion, celle d’économie, qui apporte plus de confusion que de compréhension :

« En somme, tout le monde des îles, et probablement une partie du monde de l’Asie méridionale qui lui est apparenté, connaît un même système de droit et d’économie. L’idée qu’il faut se faire de ses tribus mélanésiennes, encore plus riches et commerçantes que les polynésiennes, est donc très différente de celle que l’on se fait d’ordinaire. Ces gens ont une économie extra-domestique et un système d’échange fort développé, à battements plus intenses et plus précipités peut-être que celui que connaissaient nos paysans ou les villages pêcheurs de nos côtes il n’y a peut-être pas cent ans. Ils ont une vie économique étendue, dépassant les frontières des îles et des dialectes, un commerce considérable. Or ils remplacent rigoureusement, par des dons faits et rendus, le système des achats et des ventes. » (Mauss, Essai sur le don.)

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