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Rencontres et mésaventures autour des zapatistes :
une expérience parisienne

mardi 27 mars 2012, par Raúl Ornelas Bernal (Date de rédaction antérieure : 1997).

Divers événements ont montré, et diverses analyses ont souligné les retombées de la rébellion zapatiste dans une grande partie de la planète. Ces retombées ont été particulièrement importantes en Europe et aux États-Unis.

Mon témoignage essaie d’illustrer les caractéristiques et les limites de l’un des principaux circuits de la solidarité internationale avec l’EZLN ; pour cela j’essayerai de tracer, grosso modo, l’expérience du Comité de solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte (CSPCL) de Paris, dont je suis membre depuis mars 1995. Je m’intéresse aux « influences » des initiatives de I’EZLN à l’échelle internationale sur les comités de solidarité. De ce fait, certains trouveront mon texte très indulgent face aux vices et limitations du CSPCL. Ainsi, il reste à faire une critique interne de cette expérience de solidarité.

Le contexte

On peut différencier trois « circuits » à l’intérieur de la solidarité :

● l’humanitaire, terrain des Églises et des ONG ; en France, on parle notamment de France Libertés (fondation présidée par Danielle Mitterrand), ainsi que de Médecins du monde et de la Cimade ;
● les personnalités et organisations politiques (pour la plupart de tendance « rouge » : PC, trotskistes) ;
● la mouvance libertaire, à laquelle appartiennent la majorité des comités (dont le CSPCL-Paris), quelques squats et diverses initiatives non organiques : individus ou petits groupes, qui ont proposé des projets dans des domaines très divers, de l’alphabétisation à l’apprentissage de la fabrication d’un cerf-volant.

Chaque « circuit » a un terrain dominant d’action. Les « humanitaires » s’occupent des rapports directs avec les populations de la zone du conflit et de réaliser certaines actions « médiatiques ». L’action des personnalités et des formations politiques s’oriente vers l’organisation de débats et la publication des « analyses » et témoignages, et comporte des essais constants pour former des « cartels » d’organisations solidaires. Enfin, la mouvance libertaire a concentré ses efforts dans les initiatives « de base » : concerts, bals, débats, soirées vidéo pour récolter de l’aide et diffuser des nouvelles sur la rébellion zapatiste. Au moins à Paris, cette mouvance a dû affronter le refus total de la presse et de la télé d’ouvrir des espaces aux infos alternatives.

Dans ce contexte, le CSPCL s’est proposé trois tâches principales :

● ouvrir un espace aux informations plus proches de la réalité mexicaine ; pour cela on a créé le bulletin Ya basta ! qui présentait la chronique (presque) hebdomadaire des événements les plus importants au Mexique, et on a lancé l’édition de brochures pour faire connaître les communiqués et analyses sur la lutte zapatiste ;
● faire pression sur le gouvernement du Mexique, à travers des manifestations, meetings et lettres de protestation ;
● récolter de l’aide matérielle pour les communautés insurgées du Chiapas.

De façon générale, la solidarité s’est développée dans le cadre du rapprochement entre le Mexique et l’Union européenne, qui vise à un accord de libre-échange et coopération. La France en particulier a joué un rôle central, d’une part du point de vue économique, pour l’accroissement des échanges avec le Mexique (notamment l’augmentation des investissements et du tourisme français), et d’autre part, sur le terrain diplomatique de la négociation de l’accord, où le gouvernement français a autant soutenu que freiné les intérêts du gouvernement mexicain.

Enfin, il est nécessaire de mentionner que l’attitude des médias français face à la révolte zapatiste a été en général caractérisée par le silence et la reproduction des dépêches plus ou moins « officieuses » des agences de presse. Après un premier boom comme résultat du soulèvement en janvier 1994, et sauf la chaîne culturelle Arte, la télé s’est limitée à présenter quelques nouvelles très brèves sur les principales initiatives zapatistes (l’offensive de décembre 1994, la Consultation d’août 1995 et la Première Rencontre intergalactique). Les journaux ont été un peu moins fermés (en particulier Le Monde diplomatique, Le Monde, Libération et L’Humanité), mais leurs approches ont été assez partiales, à l’exception de Charlie Hebdo, qui a exprimé une vraie sympathie pour la lutte zapatiste (au moins jusqu’à la fin de la rencontre au Chiapas). Cette attitude des médias a affecté aussi les groupes et les individus solidaires, qui ont rencontré d’énormes difficultés pour faire passer leurs initiatives dans les médias.

Les raisons de la solidarité

Comment peut-on expliquer la mobilisation et la création des groupes de solidarité avec la rébellion zapatiste ?

On pourrait y voir une certaine continuité avec les expériences de solidarité envers l’Amérique centrale et d’autres régions où les conflits armés ont affecté dramatiquement la population civile (l’ex-Yougoslavie, divers pays d’Afrique). En France, l’humanitaire est devenu une branche de plus du système politique et ne constitue pas un espace alternatif face au pouvoir. Pourtant, dans le cas du CSPCL, la démarche « humanitaire » a été seulement l’une des motivations de ses membres ; en fait, beaucoup de gens ont fait de très courts séjours au comité et ont décidé de s’en aller dans la mesure où ils n’y ont pas trouvé des initiatives dites « concrètes ».

À mon avis, l’élément le plus attrayant a été le renouvellement de la politique que proposent les zapatistes ; et cela tant du point de vue du discours que de la pratique. On s’est senti interpellé par le discours de l’EZLN qui parlait de l’espoir, de la révolte, dans un langage pas du tout conventionnel, à contre-pied des anciennes guérillas ; en même temps, l’action directe, le fait de montrer qu’il était encore possible de se rebeller face aux plus grands pouvoirs du monde, nous a invités à « faire quelque chose » pour la cause zapatiste.

Bien entendu, il est très difficile de généraliser sur les motivations des gens qui ont participé au CPSCL. Pourtant, je pense que le point de rencontre a été la démarche antiautoritaire des zapatistes. Sur la base de cette rencontre, on peut identifier deux sous-ensembles au sein du comité.

Le premier, est celui des libertaires, notamment ceux et celles de la CNT et d’autres initiatives liées à la lutte des peuples autochtones (comme le collectif Tribal Act), d’où est née l’idée de créer le comité en février 1995, lors de l’offensive de l’armée contre les zapatistes. Ces personnes voyaient dans le discours zapatiste une proximité avec les idées libertaires, par exemple le refus de la prise du pouvoir, l’appel à se préparer pour lutter contre tout pouvoir, l’action directe (avec la destruction des symboles du pouvoir : mairies, prisons, postes de police), la critique radicale de l’avant-gardisme, la recherche du consensus, etc. [1] Toutes ces idées ont été évoquées lors des discussions internes et des débats publics pour fonder un sens de la solidarité avec la révolte zapatiste.

Le deuxième sous-ensemble est celui des individus qui n’avaient pas une expérience militante antérieure mais qui ne se reconnaissaient pas dans les démarches « tout change et rien ne bouge » de la gauche française et qui trouvaient dans la lutte de l’EZLN une motivation pour agir. Pour ces personnes, le côté éthique était l’aspect fondamental : la cohérence et la recherche du « faire la politique autrement » des zapatistes, constituaient la base pour entreprendre des actions en faveur d’un mouvement, en principe, si éloigné des préoccupations immédiates des Parisiens.

Bien qu’il y ait eu des gens appartenant à d’autres « traditions » politiques (marxistes ou autres), ils étaient des exceptions ; aussi peut-on dire que le comité n’a pas toléré la présence d’organisations autres que les libertaires [2]. L’assemblée reposait sur l’engagement de 25 à 40 personnes (selon la période), où les jeunes prédominaient, avec un groupe féministe très actif et belligérant. Un élément important pour comprendre l’attitude du CSPCL face à la politique est que ses membres appartiennent aux générations du gouvernement socialiste ; ainsi ces gens-là ont-ils vécu sous un pouvoir qui disait vouloir changer l’état des choses mais se révéla comme le meilleur garant du capitalisme ; en plus, les expériences de récupération, les interventions militaires au nom du « droit à l’ingérence humanitaire », des intellectuels de gauche devenus courtisans du pouvoir et la répression sanglante de la lutte de libération du peuple kanak (y compris l’assassinat d’Eloi Machoro), tout cela a vacciné la plupart des membres du comité contre les illusions du système politique français.

L’ambiance au sein du comité, une fois que l’on a commencé à agir, a été de refus des pratiques pourries des « spécialistes de la solidarité » (centralisation, fonctionnement délégataire et hiérarchique, primauté de l’efficacité sur le dialogue et de la « médiatisation » sur la construction des espaces propices à l’échange humain), de refus du style « diplomatique » auprès du gouvernement mexicain (pétition, langue de bois) et, en termes positifs, de recherche des rapports horizontaux entre les participants. Il me semble que l’idée principale sur laquelle nous avons démarré fut celle de réaliser un travail « à la base », sans nous préoccuper beaucoup de la diffusion médiatique. Le comité a dû faire face à une situation assez difficile ; on se sentait dans le désert, car en France il y a un silence autour de la lutte zapatiste un peu étonnant par rapport à ce qui se passe en Espagne ou aux États-Unis. Ce silence était cassé seulement par les très contestés articles de B. de la Grange (le correspondant du Monde au Mexique) ainsi que par les « officieuses » dépêches des agences de presse reproduites parfois par les journaux.

Cette richesse interne du comité s’est combinée avec un certain immobilisme des autres forces politiques (en particulier des trotskistes de la LCR qui, par leurs rapports avec leurs confrères mexicains du PRT, étaient dans une bonne position pour lancer une initiative de solidarité « ouverte au public », comme les libertaires l’ont fait en 1995). Je pense que le discours et la pratique zapatistes ont surpris et même dérangé les forces politiques (en particulier, les communistes et léninistes, avant-gardistes, etc.), qui voyaient dans la révolte des Indiens du Chiapas un retour à l’utopie et la condamnaient à l’échec, car pour ces forces politiques « on sait depuis longtemps que la question de la prise du pouvoir est fondamentale »...

Développement du CSPCL

On peut dire que le CSPCL a traversé trois périodes principales.

Notre premier projet a été la création d’un réseau parisien (qui est devenu plus ou moins national) d’information. Dans cette initiative, le bulletin Ya basta ! a joué un rôle central, car il nous a permis de faire circuler des informations obtenues directement du Mexique (surtout reprises des journaux, mais aussi rapportées par des voyageurs et des organisations) et de motiver d’autres gens pour s’incorporer aux comités. Cela correspond à une période de croissance et enrichissement du CSPCL. On vivait une ambiance de réceptivité ; on était dans l’idée qu’il fallait « défendre » la révolte zapatiste, menacée par l’offensive de février 1995.

À l’intérieur, les discussions étaient axées sur la portée des « convergences » avec d’autres groupes (notamment les groupes auxquels participaient les militants de la LCR). Ces discussions nous emmenaient généralement à la question de la méthode pour la prise de décisions. Avec le recul, je dirais que la méthode du consensus a été retenue par le comité. Cela a entraîné l’établissement d’une démarche marathonienne et l’impossibilité de trancher certaines discussions, mais il faut reconnaître que cette méthode a permis une ambiance d’écoute au sein du comité, ambiance qui a joué un rôle important dans la croissance du groupe.

La deuxième période a été marquée par la réalisation des initiatives zapatistes, principalement, la Consultation pour la paix et la démocratie et l’organisation des Rencontres « intergalactiques » (à Berlin et au Chiapas). Du point de vue organisationnel et du fonctionnement collectif, cette période a marqué le sommet du CSPCL.

La démarche de la Consultation nous a poussés hors du milieu libertaire (avant, on se contentait d’inviter le public à venir aux débats et à s’intéresser à notre bulletin) et nous a obligés à réfléchir et discuter sur la portée et le caractère de la lutte zapatiste. On a élargi l’effort d’information par la publication de brochures, centrées plus sur l’analyse que sur l’info du moment. Les temps de la Consultation ont été marqués par deux événements importants : le refus des autres initiatives de solidarité d’organiser la Consultation (« ce serait une façon de se mêler des affaires qui concernent les Mexicains et eux seuls ») et la réalisation en juin 1995 de la troisième Rencontre européenne de solidarité avec la révolte zapatiste, à Barcelone. Le premier fait a mis le CSPCL au centre de l’attention des personnes intéressées par la lutte zapatiste et a alimenté ses rangs. Cette croissance a rendu possible la réalisation des tâches dérivées de la Consultation ; l’arrivée de gens nouveaux au Comité a montré qu’il est possible d’élargir la solidarité au-delà du milieu libertaire. La rencontre à Barcelone nous a rassurés sur l’ampleur de la solidarité en Europe, ainsi que sur le caractère fondamentalement libertaire des comités ; le fait de ne pas être seuls a encouragé les travaux de préparation et de réalisation de la Consultation, lesquels se sont soldés par plus de mille six cents réponses récoltées par le CSPCL.

À l’intérieur du comité, deux discussions ont poursuivi leur développement. Celle sur la « collaboration » donnait raison aux gens qui ne voyaient pas de possibilités de travail avec les autres groupes de solidarité (« personne d’autre ne s’est intéressé à la Consultation »). Celle sur le zapatisme commençait à prendre la forme d’une mise en question du rôle des partis. Cela peut être illustré par les réponses à la Consultation en France, axées sur le refus de la conversion de l’EZLN en parti politique et sur la nécessité de garder les armes. Au moins au sein du comité, et pour une partie des personnes engagées et interpellées par la lutte zapatiste, il était clair que les partis politiques ne représentent que leurs intérêts et que le « nouveau » ne naîtra pas de ce type de formation politique.

Sur cette dynamique ascendante, nous avons continué à développer nos publications et à réaliser des actes publics d’information, parfois avec la participation d’invités du Mexique (Amado Avendaño, Marcos Arana et Hugo Trujillo, de la Conpaz). Avec les résultats de la Consultation est arrivée la convocation à la Rencontre intergalactique, mais le caractère vague de la proposition a empêché une discussion sur les enjeux et nos possibilités de participation.

À l’époque, le CSPCL avait accepté d’organiser la cinquième Rencontre européenne de solidarité, qui a eu lieu en janvier 1996 à Paris. La participation des comités et des initiatives à la rencontre a été supérieure à celle de Barcelone. On peut signaler divers résultats positifs :

● la discussion sur la forme d’organisation pour la solidarité en Europe s’est soldée par l’adhésion de la plupart des groupes à l’idée du réseau (en opposition à celle de la « coordinadora » proposée par des comités italiens et l’un des suisses) ;
● la consolidation des canaux de communication (au moins à ce niveau, on pouvait parler de l’existence d’un réseau européen) ;
● les échanges autour des « projets » de solidarité, tant de la part des comités que des communautés zapatistes.

Le fait fondamental, qui a changé la dynamique de la solidarité, a été la diffusion de la Déclaration de La Realidad, où les zapatistes ont proposé de réaliser la rencontre intergalactique. Cette déclaration a rendu « concrète » l’idée de la rencontre et a proposé le programme, la démarche générale à suivre et une méthode pour l’organisation. De façon immédiate, la proposition de réaliser une rencontre préparatoire (galactique) à Berlin paraissait donner un nouvel élan au travail collectif des groupes en Europe [3].

Pour le CSPCL, la participation à la rencontre de Berlin a signifié la réalisation de tâches assez bureaucratiques, mais aussi un besoin nouveau de sortir vers d’autres milieux, cette fois-ci, vers des initiatives en lutte. Malgré les bonnes intentions, la présence des organisations sociales provenant de France s’est limitée à quelques syndicalistes. L’effet le plus important de cette démarche a été celui d’augmenter le poids « public » (tout à fait symbolique, car on refusait la création des structures aussi au niveau français) du CSPCL dans la mouvance zapatiste, et de nous rassurer sur la viabilité des initiatives de solidarité entreprises.

Cependant, à l’époque on constate l’amplification d’un clivage au sein du comité : une fois tranchée la discussion sur les méthodes de décision, on s’interrogeait sur la démarche proposée par l’EZLN d’inviter « tout le monde » à se rendre au Chiapas, ainsi que sur la dynamique qui entraînait la mise en œuvre des initiatives de l’EZLN.

D’une part, certains ont mis en question la possibilité de « tout mélanger ». En particulier, on visait ceux qui avaient joué (ou qui jouent) un rôle dans les sphères du pouvoir néolibéral en France : les socialistes, les communistes, Danielle Mitterrand, certains intellectuels comme Régis Debray et Alain Touraine ; on disait que, en tant que comité, on ne pouvait pas cautionner la présence de ces courants à la rencontre. Cette discussion n’a pas éclaté en raison de la démarche zapatiste de les inclure comme invités, de telle sorte que leur participation (ou éventuelle absence) échappait à l’opinion des comités et individus impliqués dans l’organisation.

D’autre part, on commençait à ressentir les effets de la Consultation et de la rencontre à Berlin : on était tout le temps débordés, mais surtout, on avait la sensation de ne pas avoir un moyen de participer à la discussion des « propositions » que les zapatistes nous faisaient ; on voyait, enfin, un risque de négliger le travail à la base, même au sein du comité ; il est apparu un besoin urgent de discuter qui, malheureusement, n’a pas pu être satisfait.

Au total, l’expérience de l’organisation de l’Intergalactique a laissé un bilan équilibré. Du côté activité, l’imminence de la rencontre avec les communautés rebelles a permis le travail plus ou moins collectif des comités en France, et à Paris, elle a unifié une bonne partie des forces occupées (ou préoccupées) par la solidarité avec l’EZLN. Du côté discussion, la démarche ouverte des zapatistes a eu comme résultat le passage au premier plan des clivages politiques parisiens. Ceux-ci ont entraîné, à leur tour, le retrait d’une partie des troupes libertaires (notamment celui de la CNT). Ces groupes étaient d’ailleurs sceptiques face à un nombre important de prises de position de l’EZLN (le nationalisme, les élections, Cardenas) et sur la démarche du CSPCL (qu’ils jugeaient trop orientée vers l’humanitaire) ; ils ont vu dans la présence des « sociaux-démocrates » une incohérence des dirigeants zapatistes et, pour la plupart, ont décidé de ne pas aller à l’intergalactique.

À l’intérieur du CSPCL, deux positions ont gagné en force : celle de donner une chance aux initiatives de convergence avec des autres groupes et celle de donner la priorité à la dynamique interne, en prenant un peu de recul face aux initiatives de l’EZLN.

L’éclatement

La troisième période commence dans les discussions de l’après-rencontre intergalactique et de la préparation de la tournée de Javier Elorriaga et Gloria Benavides, premiers délégués de l’EZLN qui sortaient du Mexique.

L’après-rencontre a été marquée par une réflexion qui portait sur les « résultats » (et surtout, les « résultats concrets ») de l’Intergalactique. Ce bilan a soulevé de fortes polémiques sur le caractère et les perspectives de la lutte de l’EZLN. Le seul aspect qui faisait point d’accord était l’importance des communautés indigènes, leur organisation, leur générosité largement exprimée lors de la rencontre. En sens contraire, on avait des avis très critiques face à l’apparition de la « police zapatiste », sur les « paradoxes » du sous-commandant, sur les clivages et les différences à l’intérieur des communautés et sur les limites de la politique d’ouverture des zapatistes face aux partis et aux intellectuels.

La tournée Elorriaga-Benavides a été l’occasion de relancer la discussion sur cette dernière question. Elle avait été conçue comme une nouvelle initiative pour briser le siège militaire et politique imposé aux zapatistes : une tournée réussie permettrait de porter atteinte à l’image internationale du gouvernement mexicain et encouragerait la solution politique des demandes zapatistes (au moins, de celles qu’à l’époque ils discutaient avec le gouvernement à San Andrés) [4]. L’une des conditions de cette réussite était de rassembler le maximum de forces, tant pour organiser la tournée que pour avoir le plus large éventail d’interlocuteurs. Malheureusement, cette fois on se trouvait à l’opposé des préparatifs des rencontres pour l’humanité et contre le néolibéralisme. À la place d’une instance collective, une lettre sans destinataire, mais signée de la main de Marcos, nous a annoncé la désignation de trois personnes comme formant « la commission » pour organiser la tournée. Ces trois personnes appartiennent au « petit monde » intellectuel parisien et n’avaient pas de liens avec les comités de solidarité ; par ailleurs, il y avait des différences politiques importantes entre les membres de la commission et une bonne partie du CSPCL.

Ce choix invoquait un besoin d’efficacité. D’après la commission et même certains membres du CSPCL, les comités (et en particulier celui des Vignoles) n’étaient pas les instances adéquates pour l’organisation de la tournée, dans la mesure où ils étaient « cafouilleux »... et sectaires. La commission a invité le comité, les groupes de solidarité et les individus à s’incorporer aux travaux d’organisation de la tournée, mais elle avait déjà établi le principal de l’agenda des délégués zapatistes. Son choix était clair, il s’agissait de rencontrer les forces « importantes », celles qui pouvaient offrir un soutien politique et matériel « plus important » que celui que pouvaient offrir les comités et les différentes ONG. Figuraient parmi les rendez-vous fixés : les partis et organisations politiques (PS et PC inclus), certains responsables syndicaux, France Libertés (l’ONG de Danielle Mitterrand), en plus d’une présentation au théâtre de Brest et de la soirée médiatique à l’Odéon [5]. Par contre, la commission n’a pas eu la « délicatesse » de penser à retenir quelques espaces pour faire se rencontrer les zapatistes et les comités, et nous nous sommes retrouvés dans l’absurde situation où l’un des très rares syndicats français qui avait pris des initiatives de solidarité avec les zapatistes, la CNT [6], n’a pas été inclus dans l’agenda de la commission. Finalement, l’engagement d’une partie du CSPCL dans les tâches d’organisation de la tournée a permis d’ouvrir certains espaces de rencontre avec les délégués de l’EZLN et d’organiser un acte public hors des circuits décidés par la commission.

La démarche choisie par la direction zapatiste et l’orientation politique de la commission ont provoqué une vive contestation au sein du CSPCL (je dirais qu’il y avait aussi un malaise assez étendu dans un nombre important des comités et initiatives partout en France). Deux attitudes se sont dessinées dès les premières discussions.

La première cherchait à mettre en avant les « nécessités » des zapatistes et prônait une approche « constructive » où il était question de « s’engager » pour changer la démarche de la tournée des délégués zapatistes. Pour cette partie du CSPCL, si la direction zapatiste avait cherché l’aide des trois personnes de la commission, c’était parce qu’elle n’avait pas d’autres alternatives et — dans un recours rhétorique que j’ai encore du mal à comprendre — parce que nous, le CSPCL, nous ne nous étions pas donné la peine de nous présenter auprès des commandants et de Marcos [7].

L’attitude de contestation cherchait à affronter la démarche de la commission et à « ne pas faire le jeu des intellos ». Une partie des gens mécontents ont entrepris une initiative au-delà des discussions sans fin au sein du comité : en considérant qu’il n’y avait rien à faire face aux choix de la commission (contacts avec des partis politiques et des intellectuels très peu aimés dans la mouvance libertaire, la « médiatisation » des délégués et, en particulier, le symbole de la soirée à l’Odéon en tant que « zapashow »), un groupe de personnes (quelques-uns du CPSCL, mais surtout des gens de groupes liés à la lutte de sans-papiers, aux squats, à la CNT) a organisé la présence de différentes luttes lors de la soirée de l’Odéon. En principe étaient prévues, en plus de celle des organisateurs, la présence des sans-papiers, des chômeurs et précaires, des travailleurs de Moulinex (menacés par la fermeture de l’usine et l’ouverture d’un site de production au Mexique) ; pour diverses raisons ont seulement été présents les sans-papiers, les habitants du foyer Nouvelle-France et les militants des groupes à la base de l’initiative, plus un groupe d’AC ! (Agir contre le chômage) qui n’a pas réussi à entrer dans le théâtre.

Il y avait un double objectif dans cette action. D’abord, il s’agissait de mettre en contact avec les zapatistes des luttes et des initiatives sociales qui n’avaient pas été prises en compte par la commission ; deuxièmement, il était question de contester, dans les faits et à travers la présence des « plus petits » de la France à l’Odéon, un type de solidarité, celui qui donne la priorité aux médias et néglige le rôle que « le spectacle » joue dans la domination de nos vies (et de la vie sociale, bien entendu) [8].

Les événements de l’Odéon ont déclenché une série d’affrontements entre les groupes de solidarité et une crise majeure au sein du CSPCL.

Une fraction du comité (celle qui n’était pas au courant de l’initiative d’occuper l’Odéon) s’est sentie trahie et a qualifié l’attitude des organisateurs d’exemple des « pires méthodes politiciennes ». On mettait en question la démarche entreprise parce qu’elle avait nui (d’après eux) tant aux délégués zapatistes qu’aux quelques « alliés » dans la solidarité parisienne ; en somme, ils affirmaient que ce type d’action ne doit pas être organisé contre des « compagnons ».

En face, dans le camp de ceux qui revendiquaient l’action (y ayant participé ou non), on soutenait que le bilan devrait porter sur les résultats et que ceux-ci furent tout à fait positifs, même au niveau de la presse et surtout au niveau symbolique et humain. À ce moment-là, la « frontière » entre ce que chacun considérait comme « compagnons » est apparue comme une différence majeure au sein de la solidarité parisienne et surtout au sein du CSPCL. Ainsi, les clivages locaux en vinrent à peser plus que la convergence autour des attitudes solidaires.

Dans une ambiance assez tendue, fin 1996, le CSPCL connaît une scission. Le groupe partant fonde le Collectif Ya basta. Le CSPCL plonge dans une discussion sur les chemins pour dépasser les vieux schémas de la solidarité et rechercher une démarche viable dans la lutte contre le néolibéralisme, tout en continuant à travailler pour la cause zapatiste.

L’épisode se solde par l’affaiblissement (temporaire, j’espère) de la solidarité dans le circuit libertaire et des initiatives de base à Paris.

Quelques réflexions finales

La lutte des Indiens du Chiapas a suscité un important courant de soutien : elle a été capable de ranimer et de lier les ressorts de l’espoir de beaucoup de monde. En Amérique et en Europe, on se félicitait (et on s’étonnait) de la convergence autour des initiatives zapatistes, de forces et courants politiques et sociaux très disparates. Pourtant, après la vague initiale (couronnée par l’intergalactique) et dans la mesure où la situation politique du Mexique se dégrade, à Paris nous pouvons constater que l’élan zapatiste tend à s’essouffler [9]. En ce qui concerne le CSPCL, nous pouvons tracer trois grandes lignes de « tension » dans cette expérience de solidarité qui expliqueraient la perte relative de l’essor original.

La première concerne une évolution propre à toute prise de connaissance. J’ai l’impression que la mouvance libertaire (de même que le reste des courants et des individus) a voulu voir chez les zapatistes seulement le côté qui est le plus proche de ses propres idées et espoirs [10]. On a vécu une espèce d’idéalisation de la lutte zapatiste. Ainsi, les stratégies zapatistes (l’ouverture et les différentes prises de position sur les élections, la conversion en force politique), l’accroissement des échanges et les séjours des membres du CSPCL au Chiapas ont montré que la réalité des communautés et de l’armée zapatiste est beaucoup plus complexe que les idées formées un peu « sur mesure ». Au sein du comité (et dans l’ensemble de la solidarité), nous avons eu beaucoup de mal à comprendre et à interpréter le caractère innovateur de la lutte zapatiste.

Ce processus a entraîné une évolution dans les positions des groupes et des individus par rapport à leur engagement dans la solidarité : les démarches politiques ont changé, certains sont partis et de nouveaux participants cherchent une place. Après la scission, le Collectif Ya basta continue à développer une ligne d’action plus ou moins « classique » (information sur la situation au Mexique, diffusion des initiatives), tandis que le CSPCL se propose de tisser des liens entre les luttes en France et celles du Mexique, tant au niveau de l’information que sur le plan humain et de l’action directe [11].

La deuxième tension concerne les rapports entre les zapatistes et la solidarité. D’une part, les zapatistes ont changé la « demande » de solidarité : il ne s’agissait plus de « soutenir » une cause lointaine et de donner des directives à partir du comité central de mouvements avant-gardistes du style FSLN (au Nicaragua) ou FMLN (au Salvador), mais bien d’appeler à lutter sur place et à rechercher des chemins propres et adaptés à la situation de chaque groupe et personne. D’autre part, on n’a jamais trouvé un pont pour développer de façon conjointe les initiatives internationales : plus qu’un « dirigisme », nous avons ressenti une situation de non-écoute, où les individus solidaires sont devenus des supporters. Ainsi, la démarche épistolaire et « personnalisée » de l’EZLN [12] a trouvé ses limites. On a besoin de développer des canaux d’échanges entre les divers éléments de la solidarité, mais, attention, cela n’a rien à voir avec la création de structures ou de bureaucraties quelconques. À mon avis, le défi le plus important de la solidarité est celui de développer un nouvel internationalisme surmontant cette tension entre solidarité et lutte contre le néolibéralisme. Pour les comités, est-il possible d’inventer les moyens d’agir ensemble contre l’ennemi commun, et de fondre dans un seul mouvement la solidarité et la lutte contre le néolibéralisme ?

Enfin, la politique d’ouverture des zapatistes devra affronter de plus en plus son paradoxe interne. À travers l’expérience de la tournée en France et de la seconde intergalactique, on constate que la lutte zapatiste ne peut pas constituer un facteur d’unité de la « gauche » internationale. Pour atteindre une telle unité, il y a encore beaucoup de chemin à faire, comme cela a été montré par les grèves de 1995 en France : seul un séisme social de ce type a réussi à imposer l’unité dans l’action, même si les bureaucraties se sont chargées de la défaire au lendemain de la fin des grèves.

Cette tension comprend deux terrains de réflexion. Le premier concerne les limites de l’idée du dialogue « ouvert et avec tout le monde ». Bien que cette idée ait été l’une des plus importantes réussites de l’EZLN et de son porte-parole, actuellement, il est nécessaire de la structurer au niveau international d’une manière semblable à celle que les zapatistes utilisent au Mexique. II est nécessaire de distinguer le contact avec le pouvoir — style les Dialogues de San Andrés — de la recherche des alternatives de la part des « plus petits » — style le Forum indigène et le Congrès national indigène. Il ne semble plus possible de chercher un contact direct, orienté vers la construction d’une alternative, entre, d’une part, les forces politiques et les intellectuels intégrés au système, et d’autre part les luttes qui s’opposent au pouvoir et qui de plus en plus refusent la participation aux instances d’exercice du pouvoir. Il sera de plus en plus difficile de faire converger ces deux pôles dans un contexte où la gauche traditionnelle a repris la gestion de l’État et où elle n’a pas tenu sa parole (par exemple, le nouveau gouvernement français face à la demande de régularisation de tous les sans-papiers et d’abrogation des lois Pasqua sur l’immigration). Il faudrait structurer un dialogue à plusieurs niveaux.

Le deuxième entraîne une discussion et une pratique qui rendent possible le « faire de la politique autrement » au sein des groupes de solidarité. Un important travail est nécessaire pour incorporer la tolérance et les pratiques du vrai dialogue. Il nous faut réfléchir sur la situation de l’ennemi principal et apprendre à travailler de façon collective sans renoncer à nos différences. Mon idée est que la solidarité pourra avancer et se développer dans la mesure où elle peut devenir une résistance, une révolte contre le néolibéralisme.

Raúl Ornelas
Mexico-Paris, août 1997.

P-S : Vous trouverez d’autres opinions sur l’expérience du CSPCL et la solidarité internationale dans la revue de la CNT, Les Temps maudits, n° 1, juin 1997 : Gregor Markowitz, « Une internationale zapatiste ? Ou autopsie d’un mouvement de solidarité (presque) réussi. L’exemple parisien » ; Marc Tomsin, « Réponses à l’enquête de la revue Chiapas ».

Publié dans les Cahiers marxistes, n° 209,
« Chiapas, dialogue pour la dignité »,
juin-juillet 1998, Bruxelles.

Notes

[1Voir les témoignages des membres des comités européens recueillis dans la revue Chiapas, n° 4 (Instituto de Investigaciones Económicas, UNAM), Mexico. 1997.

[2Cette question est très complexe. D’abord, parce que le comité a été conçu comme une assemblée d’individus et, de ce fait, il était ouvert à tout le monde, sans que l’appartenance à une autre organisation ne soit un obstacle. Deuxièmement, au moins de façon implicite, dans la mesure où il s’agissait d’être solidaire avec un mouvement étranger, toutes les organisations pouvaient faire leur apport. Pourtant, dans la pratique, les clivages, les différences et les (mauvaises) expériences dans des luttes locales ont empêché la convergence des forces et la participation des militants non libertaires au sein du comité. Ainsi, à Paris (et un peu partout en France), on n’a pas formé un espace de « coordination » du style plataformas, comme en Espagne ou en Italie.

[3Pourtant, cet élan va s’essouffler petit à petit. La rencontre à Berlin a été, pour une bonne partie des membres du CSPCL, un succès, mais son organisation a été fondamentalement locale, fondée sur un extraordinaire travail des Berlinois.

[4Dans son texte « Entre la memoria y et olvido : guerrillas, movimiento indigena y reformas legales en la hora del EZLN » (revue Chiapas, n° 4), Luis Hernandez Navarro fait une analyse des conditions qui ont mené la direction zapatiste à cette politique d’ouverture aux forces politiques « traditionnelles ».

[5La commission avait conçu comme point culminant de la tournée, une « soirée zapatiste » au théâtre de l’Odéon. Avec la participation du directeur du théâtre, ils ont organisé des projections de vidéos, une lecture des communiqués et textes de Marcos et un débat entre R. Debray, G. Lavaudant, Antonio García de Leon, Jaime Avilés, Adolfo Gilly et les deux délégués zapatistes.

[6Cette participation de la CNT est l’un des exemples les plus intéressants des paradoxes de la solidarité et des différences de cette solidarité par rapport aux expériences antérieures envers les mouvements du Salvador et du Nicaragua. Quelques membres de la CNT ont participé à la fondation du comité et ont toujours prôné une approche où les clivages et les considérations sur la réalité française ont pesé plus que les besoins de travailler en coordination avec les autres groupes de solidarité. Malgré les différences entre ce noyau et une bonne partie du CSPCL, la CNT a toujours eu une attitude respectueuse et franche vis-à-vis du comité et il n’a jamais été question d’utiliser les divers moyens de soutien (locaux, téléphone, courrier, pour ne pas parler des aspects politiques) pour exercer une pression quelconque sur les orientations du CSPCL.

[7Il faut rappeler que la convocation à la Rencontre intergalactique a été adressée au CSPCL en janvier 1996, et qu’on avait fait publier plusieurs lettres dans des journaux mexicains en solidarité avec les zapatistes, pour ne pas parler des contacts du CSPCL avec une bonne partie des comités européens, en particulier, celui de Barcelone, l’un des plus actifs en Europe. D’ailleurs, il est évident que l’un des domaines les plus forts de la direction zapatiste (et particulièrement de Marcos) est sa connaissance des réalités qui concernent directement sa lutte. Je consigne cet argument, non de façon anecdotique (ou pas seulement), mais en tant qu’illustration du processus de « non-écoute » qu’a commencé à vivre à l’époque le CSPCL.

[8Parmi les « influences » qui nourrissent le CSPCL, on peut compter le situationnisme, en particulier, les idées de Debord sur la société du spectacle. A. Mattelart a donné une analyse aiguë sur les implications des choix des ONG (et en général, des groupes ou organisations politiques et sociales opposées au pouvoir) par rapport aux médias dans le texte « Les nouveaux scénarios de la communication mondiale » (Le Monde diplomatique, août 1995). Jérôme Baschet a fait une critique de la médiatisation de la lutte zapatiste et de la figure de Marcos (« Médiatique le sous-commandant Marcos ? », Le Monde, 3 août 1996).

[9Bien entendu, on ne peut pas généraliser cette idée à l’ensemble de la solidarité.

[10On peut lire les propos de Marcos sur « l’impossibilité » de définir la lutte zapatiste dans les interviews de la revue uruguayenne Brecha et du livre de Le Bot.

[11Dans cette idée, le CSPCL a assisté à une journée d’information dans le foyer des travailleurs maliens Nouvelle-France de Montreuil. Enfin traduites en soninké, les nouvelles du Chiapas et des zapatistes ont pris un visage très différent et très éloigné de celui qu’on regarde dans les salons de la gauche parisienne. Plusieurs symboles s’y sont retrouvés. Le foyer original des amis maliens avait été rasé par la mairie communiste de Montreuil, ce qui fut à l’origine d’une lutte qui dure depuis longtemps. Deuxièmement, lors de la tournée des zapatistes en France, il avait été question de jumeler Montreuil (entre autres) avec les communautés zapatistes du Chiapas, idée qui avait été vivement contestée par une partie du CSPCL.

[12Démarche qui comprend tant le rôle de Marcos comme l’homme chargé des rapports avec la société civile, que le fait de donner presque toujours à des « personnalités » et non aux individus, comités et/ou organisations les responsabilités sur certaines tâches à réaliser.

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