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Lettre du Mexique en soutien à la lutte de Notre-Dame-des-Landes

vendredi 16 novembre 2012

Le 25 octobre 2012, dans le cadre de la rencontre/séminaire « Mexique-Europe : ils ne passeront pas », des centaines de personnes se sont réunies au Centre intégral de formation indigène/Université de la Terre de San Cristóbal de Las Casas, au Chiapas. Parmi les participants se trouvaient des internationaux, des habitants de San Cristóbal de Las Casas et de nombreux paysans et délégués des communautés de Bachajón, de Tila, de la forêt des Chimalapas (Oaxaca) ainsi que d’autres villages et hameaux du Chiapas, venus partager et écouter les expériences de résistance face aux mégaprojets, en Europe et au Mexique. L’initiative de cette lettre de soutien, signée depuis par de nombreuses organisations, individus et collectifs mexicains, est née dans la foulée de ces rencontres.

Le 30 octobre 2012,

Aux gens de Notre-Dame-des-Landes et de France en résistance,
À l’ACIPA, à l’ADECA, à la coordination des opposants au projet d’aéroport,
Aux associations « COPAIN », aux habitants et habitantes qui résistent
et à tous les occupants et occupantes de la « zone à défendre » (ZAD),
Aux médias alternatifs et sincères,
À l’Autre Campagne et à la Sexta internationale,
Aux luttes contre les mégaprojets et pour la défense de la terre partout dans le monde,

Ici, au Mexique, c’est rage et indignation que nous ressentons après avoir été informés de l’expulsion et de la destruction de maisons, de forêts et de terres de culture par la police française à Notre-Dame-des-Landes, depuis le 16 octobre. Une zone agricole est menacée par le gouvernement socialiste français et son premier ministre, Jean-Marc Ayrault, qui veut imposer sur ces champs de l’ouest de la France un nouvel aéroport de taille internationale, et ce malgré l’opposition des paysans et des paysannes, des jeunes et d’une bonne partie de la population. Nous savons que ce chantier est complètement inutile vu qu’il y a déjà beaucoup d’aéroports en France, et nous sommes au courant du réchauffement climatique global provoqué par la multiplication des avions que seuls les riches peuvent se payer. Nous savons aussi, car ils voulaient l’imposer aux villages d’Atenco, dans l’État de Mexico, que la construction d’un aéroport entraîne à elle seule la convoitise pour les terres, l’urbanisation accélérée et l’implantation d’industries dans des zones encore rurales, où l’environnement a été préservé. Ce que ces projets amènent, c’est la division et le contrôle social de la population, et encore une fois ce sont les paysans qui se retrouvent spoliés par des constructions imposées de force et uniquement destinées aux gens de la ville ayant beaucoup d’argent.

Malgré l’énorme distance qui nous sépare, nous voulons vous dire que nos luttes sont semblables : votre lutte est un miroir de la situation de pillage que nous vivons sur nos terres. Il est important pour nous de nous informer de ce qui arrive en Europe, parce que ce sont des modèles qu’on veut nous imposer ici aussi et que nous non plus, nous ne voulons pas perdre nos terres, nos territoires et nos modes de vie.

Nous voulons vous dire également qu’au Mexique nous luttons aussi contre le pillage des terres, comme c’est le cas des communautés de Tila et de Bachajón au Chiapas, où les terres sont menacées d’être spoliées pour des projets touristiques, ou bien encore dans l’isthme de Tehuantepec, où les terres sont enlevées aux villages indigènes ikoots et binniza, et où sont imposées des centaines et des milliers d’éoliennes produisant de l’énergie pour les multinationales et où, tout comme à Notre-Dame-des-Landes, la police est envoyée pour surveiller les chantiers ; ou encore à Huexca, dans l’État de Morelos, où des brigades antiémeute ont été envoyées il y a quelques jours pour imposer un gazoduc et une usine thermoélectrique d’une entreprise espagnole, et cela malgré les risques liés à la proximité du volcan Popocatépetl ; comme à Atenco, où le projet d’aéroport est toujours d’actualité ; comme ce qui se passe contre les communautés zapatistes au Chiapas, que le gouvernement veut déposséder des terres récupérées grâce au soulèvement de 1994 ; comme, enfin, dans des dizaines et des centaines d’autres villages et de communautés partout au Mexique, où ils nous dépossèdent de la terre et nous imposent des projets de mort, mines à ciel ouvert, barrages hydroélectriques, autoroutes, « villes rurales », et tant d’autres projets de « développement » qui cherchent à en finir avec nos communautés et nos terres collectives.

Ces projets inutiles bénéficient seulement aux entreprises telles qu’OHL, Endesa, Gamesa, EDF, Mall, Goldcorp, Blackfire, Iberdrola, Monsanto, parmi d’autres. C’est à cause de ces entreprises qu’ils nous répriment et nous envoient la police et les brigades antiémeute, mais aussi qu’ils corrompent, achètent les élections et imposent des gouvernements, comme cela fut le cas du président Enrique Peña Nieto et de tant d’autres marionnettes politiques. Leur cupidité et leur désir sans limite d’imposer ces mégaprojets en arrivent même à l’ignominie d’instrumentaliser des groupes paramilitaires, d’imposer les cartels de la drogue et de payer des tueurs à gages pour nous assassiner.

Partout dans le monde, chaque jour nous voyons plus clairement jusqu’à quel point peuvent en arriver ceux d’en haut afin de mettre en place des politiques qui piétinent les peuples au bénéfice du pouvoir économique. Ils sont capables d’inventer une guerre d’extermination contre tous ceux qui s’opposent comme nous à leurs plans de mort. Mais chaque fois qu’ils nous frappent, nous sommes encore plus conscients du système destructeur auquel ils veulent nous soumettre.

Compagnons et compagnes, nous ne fraternisons pas seulement dans la lutte contre la répression : nous voyons aussi que nous partageons la même conscience que notre planète n’appartient pas aux hommes politiques et aux riches qui sont leurs collègues, mais bien aux peuples et aux êtres vivants qui l’habitent. Nous partageons aussi la pleine conscience du fait que nous luttons partout contre ces gouvernements qui se disent démocratiques mais qui nous imposent ces projets, nous divisent et nous détruisent pour satisfaire la dictature de l’argent.

C’est pour cela que nous voulons vous donner du courage dans votre lutte, dans cette étape difficile où ils saccagent vos maisons et vos terres. Nous voulons vous dire que bien que nous ne soyons pas près de vous, vous n’êtes pas seuls et seules. Nous sommes très nombreux à lutter jour après jour contre ces projets de mort pour défendre nos terres, nos territoires et nos façons d’être, c’est-à-dire pour défendre la vie. Nous sommes très nombreux à lutter contre les entreprises transnationales et les gouvernements corrompus. Ce qui nous manque seulement, c’est de nous rencontrer, nous écouter et mieux nous solidariser dans la lutte. C’est le moment de réfléchir et de nous organiser face à la soumission à laquelle ils nous condamnent. C’est le moment de nous retrouver sur cette planète qui se rebelle.

Compagnons et compagnes,

Nous ne sommes pas seulement quelques-uns, nous sommes des milliers !
Pas un pas en arrière !
Nous sommes avec vous !
À bas les projets de mort !
Vive la solidarité !
Vive la lutte de Notre-Dame-des-Landes !
Vive la lutte contre les mégaprojets inutiles !

Collectifs et organisations du Mexique

Collectif à l’initiative du forum « Mexique-Europe : ils ne passeront pas » ; Front des villages en défense de la terre (FPDT), Atenco ; Assemblée des villages indigènes de l’Isthme en défense de la terre et du territoire (APIIDT), isthme de Tehuantepec ; Organisations indigènes pour les droits humains à Oaxaca (OIDHO) ; Communautés paysannes et urbaines solidaires(Comcausa) ; collectif La Rébellion de Tehuantepec, isthme de Tehuantepec ; Groupe solidaire de la communauté La Venta, isthme de Tehuantepec ; Union des communautés indigènes de la zone nord de l’Isthme (Ucizoni) ; radio communautaire Las Voces de los Pueblos 94.1 Matias Romero, Oaxaca ; Assemblée nationale des victimes environnementales (ANAA) ; Alliance mexicaine pour l’autodétermination des peuples (AMAP) ; Mouvement agraire indigène zapatiste (MAIZ) ; Réseau national de résistance au prix cher de l’électricité (Mexique) ; Réseau mexicain d’action face au libre-commerce (RMALC) ; Lien urbain de la dignité, Puebla ; Nœud des droits humains, Puebla ; Secteur national ouvrier et des travailleurs de la ville, des champs, de la mer et de l’air de l’Autre Campagne ; Syndicat national des travailleurs d’Uniroyal ; Coalition des travailleurs administratifs et académiques du Syndicat des travailleurs de l’Université nationale autonome de Mexico ; Collectif action intelligente des chômeurs, étudiants et travailleurs ; Centre autonome d’apprentissage et de formation politique des travailleurs et travailleuses de l’Autre Campagne ; Dorados de Villa ; Communauté autonome Ernesto Guevara de la Serna ; Communauté autonome Ollin Alexis Benhumea Hernández ; Secteur des travailleurs de l’Autre Campagne Oaxaca ; La Otra Huasteca Totonacapan ; Brigade de rue Elisa Martínez de soutien à la femme ; Réseau mexicain du travail sexuel ; Espace social et culturel La Karakola (Mexico DF) ; collectif Pozol, Tuxtla Gutiérrez ; Zapateando (média libre adhérent de l’Autre Campagne) ; Agence d’information indépendante Noti-Calle, Notilibertas ; émission de radio « Les fils de la Terre » ; revue La Guillotina, Mexico DF ; Croix noire anarchiste de Mexico ; Nodo Solidale Mexico ; Collectif Azcapotzalco, Mexico DF ; Coordination nationale « Plan de Ayala » Mouvement national (CNPA-MN) ; Organisation zapatiste Éducation pour la libération de nos peuples ; collectif Caracol Matlatl, Toluca (État de Mexico) ; revue électronique Desinformémonos ; Kolektivo de Boka en Boka, San Cristóbal (Chiapas) ; Commune autonome de San Juan Copala, Oaxaca ; comuneros du village de San Pedro Atlapulco (État de México) ; Centre des droits humains Digna Ochoa (Tonala, Chiapas) ; Conseil autonome de la zone côtière du Chiapas ; Front civique tonaltèque (Tonala, Chiapas) ; Réseau contre la répression et pour la solidarité, Chiapas.

Individus

Manuel Antonio Ruiz, lycée communautaire José Martí ; Ricardo Alvarado (Toluca, Mexique) ; Sonia Voisin (Lyon, France) ; Priscila Tercero, adhérente de l’Autre Campagne ; Gloria Muñoz Ramírez ; Marcela Salas Jaime Quintana ; Sergio Castro ; Adazahira Chávez ; Felix Garcia Lazcarez ; Dr Alfredo Velarde Saracho ; Elsa Mocquet La Milpa (San Cristóbal, Chiapas) ; Alèssi Dell’Umbria (Marseille-Oaxaca), Dr Rubén Ramírez Arellano, Université de la Ciénega de Michoacán de Ocampo (Mexique) ; Alfonso Leija Salas, Mexico ; Paulo Gustavo Roman, adhérent de l’Autre Campagne Brésil ; Alejandro Cruz Juarez ; Lena García Feijoo ; Dr Felipe I. Echenique March, INAH ; Manuel Antonio Ruiz (Oaxaca) ; León Chavez Teixeiro (Grande-Bretagne - Mexique) ; Sofia Olhovich Filonova.

Collectifs de solidarité européens

Groupe B.A.S.T.A., Münster, Allemagne ; Les trois passants, France ; Plate-forme de solidarité avec le Chiapas et le Guatemala de Madrid, Espagne ; Caracol Solidario, Franche-Comté ; Espoir Chiapas / Esperanza Chiapas ; Comité de solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte, Paris ; Collectif Chiapas Ariège ; Nodo Solidale, Italie ; centre social Le Passe-Partout et groupe CafeZ, Liège (Belgique) ; Mut Vitz 13, Marseille.

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