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Lettre de la Coordination générale du Système éducatif rebelle autonome zapatiste des Altos

lundi 22 mai 2000, par EZLN

EZLN - CGSERAZLN - ESRAZ « 1er Janvier », Chiapas, Mexique.

À l’attention des frères et sœurs du CSPCL, du Groupe libertaire de Dijon, du groupe de théâtre Tamèrantong !, de liFe liVe, des groupes de musique Flor del Fango et Le Facteur, de la salle de concerts Le Café de la Danse, de Paris, France, Vieux Continent.

De la part de la CGSERAZLN, des comités d’éducation de l’ESRAZ « 1er Janvier », des 12 promoteurs éducateurs de l’ESRAZ, des 170 élèves qui étudient déjà à l’ESRAZ, du CCRI, de nos communes autonomes.

De quelque lieu ou recoin de l’Aguascalientes II, d’Oventik, San Andrés Sacamch’en de los Pobres, région glacée et montagneuse des Altos de Chiapas, digne cœur de l’EZLN ; siège de la Coordination générale du Système éducatif rebelle autonome zapatiste (CGSERAZLN) et de l’École secondaire rebelle autonome zapatiste (ESRAZ) « 1er Janvier ».

Par notre voix s’exprime la voix véritable de nos peuples, c’est la parole des nôtres tombés dans les combats des premiers jours de janvier 1994, c’est la parole de nos morts, de nos disparus, de nos prisonniers ; des milliers d’hommes, de femmes, d’enfants et d’anciens, c’est la parole de nos déplacés à cause de la guerre sale que nous livre le gouvernement fédéral et de l’État [chiapanèque], c’est la parole des 12 promoteurs éducateurs de l’ESRAZ, c’est la parole de la commission d’éducation du CCRI, ce sont les paroles des 170 élèves (garçons et filles) de l’ESRAZ, c’est la parole de nos montagnes, c’est la parole vraie de la nuit, des sentiers, c’est le bruit des ruisseaux et des rivières, ce sont les paroles des animaux des montagnes, qui eux aussi pâtissent de la guerre du mauvais gouvernement, c’est la parole de notre histoire véritable, ce sont les paroles de nos ancêtres, comme les Mayas, les Totonaques, les Aztèques, les Toltèques, ce sont les vraies paroles des Tzeltales, des Choles, des Tzotziles, des Tojolabales, des Zoques, des Mames, des Cakchiquel et de tous les groupes indigènes du peuple du Mexique, ce sont les paroles du nouveau Système éducatif zapatiste mexicain et du monde, pour elles toutes et eux tous, nous vous disons notre parole vraie à vous tous, frères et sœurs de ce pays [la France].

De ce lieu et par ce communiqué, nous vous envoyons notre fraternel salut révolutionnaire selon les souhaits de la CGSERAZLN et de l’ESRAZ, et nous vous disons encore une fois qu’avec vous et nous-mêmes nous avons déjà commencé à réaliser une partie de nos rêves qui est l’éducation secondaire, que depuis 1998 ont commencé à être élaborés de nouveaux projets et programmes pour la première ESRAZ zapatiste, nous vous disons à tous que déjà ont commencé à prendre corps nos rêves qui sont de construire un nouveau système éducatif national et mondial, et qui serve aux indigènes et non-indigènes de ce pays et du monde comme exemple à suivre.

Avec nous-mêmes et vous, nos frères et nos sœurs, l’histoire est en train de s’écrire DÉJÀ, dans chaque village zapatiste et dans chaque base de soutien zapatiste, nous gardons dans nos cœurs et nos mémoires les appuis solidaires que vous avez pu faire parvenir pour soutenir le Système éducatif zapatiste de libération nationale et l’ESRAZ « 1er Janvier ».

Nous voulons vous remercier toutes et tous pour tout l’effort que vous avez déployé pour parvenir à recueillir des fonds afin de soutenir l’ESRAZ de l’Aguascalientes II, d’Oventik, et cela nous fait très plaisir et nous vous félicitons pour tout le travail collectif que vous avez déjà commencé à réaliser, et vous pouvez être sûrs que l’argent que vous nous envoyez sera employé de la meilleure façon possible, nous voyons que vous êtes déjà zapatistes parce que vous nous annoncez dans vos lettres que déjà vous travaillez de façon collective ; tout ce qui a été collecté par les cinq groupes, qui représente la somme de 37 429 pesos mexicains (soit 30 000 francs français), nous l’avons reçu dans la soirée du 21 mai à Oventik, nous vous disons que la remise de cet argent fut effectuée par la compañera Emiliana, parce que ce fut elle qui apporta l’argent et non Miranda, cela parce qu’il y a beaucoup de barrages militaires pour arriver à Oventik et, pour la sécurité de Miranda ou qu’elle ne soit pas expulsée du pays, nous disons que c’est très bien ainsi, pour nous c’est comme si Miranda elle-même nous avait remis l’argent, mais, n’en doutez pas, il est parvenu entre nos mains (les 37 429 pesos mexicains, déjà changés en pesos, soit 30 000 francs pour vous).

Nous voulons vous faire savoir que l’inauguration des classes de l’école secondaire eut lieu le 10 avril avec 170 élèves de différentes communes des Altos de Chiapas, garçons et filles qui doivent marcher trois heures, huit heures jusqu’à quinze ou vingt heures pour parvenir à cette école secondaire, qui déjà a commencé à fonctionner comme un internat parce qu’ils peuvent y manger et dormir. En raison de la situation difficile que nous traversons, nous n’avons pu faire aucune déclaration au sujet de l’inauguration de ces classes, parce que nous nous rendions compte qu’une déclaration sur le fonctionnement d’un nouveau système éducatif zapatiste allait faire très mal au gouvernement mexicain et que, si elle était faite, l’armée du mauvais gouvernement pouvait prendre d’assaut Oventik et l’école. Pour cela, l’inauguration n’a pas été divulguée ni le début des cours, au plan national et international. Nous n’avons invité personne, ni aucun des groupes qui nous ont soutenus pour cette école. Nous avons agi ainsi pour ne pas mettre en péril l’Aguascalientes.

Nous espérons que vous nous comprendrez et que si nous rendons public aussi que vous nous soutenez c’est comme vous fermer le passage pour que vous continuiez à travailler avec nous depuis là-bas, en France.

Nous vous demandons également que vous cherchiez un moyen d’organiser une caravane ou une délégation qui vienne à Oventic le 8 ou le 10 juillet de cette année, cette invitation nous la faisons en tant que CGSERAZLN, comités de l’ESRAZ, élèves et promoteurs de l’ESRAZ. En même temps, nous profiterons de votre présence pour parler directement avec vous. Cela pour voir si vous prenez notre parole pour que vous continuiez à nous appuyer solidairement pour l’alimentation des enfants de l’ESRAZ, soit pour chaque deux mois ou pour chaque trois mois ; de cela, nous voulons parler directement avec vous tous parce que, comme vous savez bien, un enfant qui a faim ne peut pas étudier correctement. C’est pour cela qu’il faut avoir de la nourriture pour eux. Nous vous demandons d’analyser cela dans chacun des cinq groupes pour nous le faire savoir postérieurement.

La diffusion de communiqués que vous avez faite est très bonne, dénoncez à chaque fois que c’est nécessaire ; nous voyons que tout ce dont vous nous informez dans ce communiqué devient une partie de la guerre et cela nous aide beaucoup. Continuez, continuez et continuez à faire tous ces travaux, frères et sœurs, avec vos communiqués vous êtes, vous aussi, en train de faire la guerre au gouvernement mexicain et au gouvernement français, en avant frères et sœurs, tout ce qui se fait pour la cause zapatiste est le bienvenu.

Frères et sœurs français : vous nous avez demandé maintes fois si nous allions envoyer une délégation chez vous. C’est avec de la peine que nous répétons : étant donné la situation, nous ne pouvons pas sortir du pays. Ce sont des ordres émanant de nos peuples, et aussi des problèmes de papiers... Mais il ne faut pas perdre l’espoir. Le jour viendra où l’on sera ensemble. Ayez de la patience, ce n’est pas un manque d’envie de notre part mais la situation qui est difficile. Dès que cela sera possible nous serons là-bas avec vous, mais attendez-nous encore un petit peu.

Nous vous informons aussi que nos communes et communautés subissent de plus en plus l’invasion militaire. Début mai a eu lieu une incursion de la police de sécurité publique, de la police judiciaire de l’État, de la police judiciaire fédérale, de la police fédérale préventive, en opération conjointe avec l’armée mexicaine. Ils piétinent déjà les sentiers, les plantations de café, de maïs. La situation est très tendue dans la commune de San Andrés, la commune autonome de Polhó, la commune de San Miguel Mitontic, la commune autonome de Santa Catarina Pantelhó, dans les communes de Bachajon, Tila, Sabanilla, Ocosingo et d’autres encore comme la commune autonome de Nicolas Ruiz. Nous sommes de plus en plus assiégés.

Le 8 mai s’est produit une infiltration de l’intelligence militaire à Oventik. Ils ont demandé où était l’école, qui était et comment s’appelait le coordinateur général et qui étaient et comment s’appelaient les comités d’éducation et qui étaient les promoteurs. Tout cela fait partie de la guerre sale contre nous.

Ils veulent détruire notre école, donner l’assaut à l’école d’Oventik et former là-bas une caserne militaire. Ils veulent emprisonner ceux de la commission d’éducation et les faire disparaître pour détruire l’école et ses plans d’éducation zapatiste. Nous vous informons afin que vous dénonciez cela là-bas, en France, par la radio, par la télévision, par la presse et par Internet.

Faites-le, compañer@s, dites que le mauvais gouvernement ne veut pas la paix, mais qu’il veut la guerre et l’extermination des peuples indigènes et de nous qui luttons pour la Démocratie, la Liberté et la Justice.

Soyez assurés que la confiance en vous sera toujours scellée par notre parole vraie. C’est tout pour le moment. Il faut que vous sachiez que nous sommes déjà en train de partager beaucoup d’autres expériences similaires et nous vous disons qu’un jour nous serons là-bas avec vous. À bientôt frères et sœurs, merci, merci beaucoup.

C’est bien ainsi, pour toutes et tous, nos paroles font déjà le chemin ensemble.

Fraternellement.

¡¡¡Democracia, Libertad y Justicia !!!

Au nom des compañeros du comité d’éducation
de l’École secondaire rebelle autonome zapatiste « 1er Janvier »

Coordination générale du Système éducatif rebelle
autonome zapatiste de libération nationale

De quelque endroit dans les montagnes
de la commune de San Andrés Sacamch’en de los Pobres,
Chiapas, Sud-Est mexicain ;
le 22 mai de l’année zéro.

P-S Nous attendons votre réponse pour savoir si notre message est bien arrivé entre vos mains.

Traduit par Michelle et Julio.

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