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Déclaration de la Commune autonome de San Juan Copala à la rencontre de Vícam

lundi 29 novembre 2010

Aux compañeros et frères du CNI,
Aux compañeros et frères yaquis de Vícam (Sonora),
À l’Autre Campagne,
Aux organisations sociales,
Au peuple opprimé et exploité,

Dans chaque coin de notre Mexique, qui a coûté tant de sang et de larmes à nos ancêtres, lutter pour ce qui a le plus de prix dans la vie humaine, les richesses naturelles, défendre notre mère la terre quoi qu’il en coûte, même la vie.

Aujourd’hui plus que jamais, cette lutte est celle de tous les peuples indigènes, de tous ceux d’en bas, quand on attaque l’un de nous on nous attaque tous, il est temps de nous unir et non de nous diviser, il est temps de nous organiser et de ne pas laisser mourir tout seuls nos frères indigènes d’où qu’ils soient et où qu’ils se trouvent. Il est temps de lutter contre le système politique et le système économique capitalistes, contre la répression, la militarisation et la paramilitarisation ; il est temps de lutter avec d’autres comme nous contre les ennemis du peuple, contre le pouvoir qu’exercent quelques-uns qui s’emparent de tout ce qui est à nous et même de notre vie. Il n’est jamais trop tard, mais il vaut mieux commencer tout de suite, et non plus tard, quand ils nous aurons réduits en esclavage. Récupérons notre présent et notre avenir, et celui de nos frères yaquis à qui nous sommes venus dire qu’ils ne sont pas seuls, que nous nous joignons à cette lutte digne qu’ils mènent et qui est celle de nous tous.

Nous, de la Commune autonome, savons bien dans notre propre chair ce qu’on ressent quand le puissant réprime, emprisonne, assassine, sème la terreur. Nous avons versé des larmes, nous, les enfants, les femmes, les anciens et les jeunes qui avons mené la résistance. Mais nous voyons que cela ne suffit pas, que nous devons élever notre voix, nous mettre d’accord et agir aujourd’hui, demain, et toujours.

Ce qui est fondamental pour nous, c’est la lutte pour l’autonomie des peuples indigènes, pour qu’on respecte nos us et coutumes, nos traditions, et pour retrouver notre identité en tant qu’indigènes et mexicains ; c’est ainsi que nous pourrons défendre, dans la liberté et la justice, nos ressources naturelles et nous organiser comme nous voulons être et non comme les mauvais gouvernements voudraient que nous soyons.

Ces pensées, ces sentiments, ces engagements pour l’autonomie, sont les idéaux qui nous soutiennent face à l’assaut de l’État et de ses groupes paramilitaires qui nous ont tenus assiégés près de six mois, et ont causé la mort de plus de trente compañeros, autour de quinze blessés, parmi eux des enfants, des femmes et des personnes de grand âge, dont le seul délit a été de défendre leur droit au présent et à l’avenir en récupérant le passé et en résistant au puissant dans sa soif de nous dépouiller. La répression a été le prix à payer pour vouloir être indigènes en gardant notre identité le front haut, dignement, car nous ne nous sommes jamais agenouillés devant les ennemis du peuple, ceux qui ont le pouvoir et l’argent.

Alors que nous faisions partie du MULT est sortie la Sixième Déclaration de la forêt Lacandone ; nous y avons adhéré pour rejoindre l’Autre Campagne et le Congrès national indigène. À plus forte raison, lorsque nous avons proclamé la fondation de la Commune autonome, nous avons confirmé notre adhésion parce que nous embrassions ouvertement la lutte pour l’autonomie, pour la terre et le territoire, contre l’injuste système capitaliste et pour le rejet des partis électoralistes du système. Cela nous a amenés à nous séparer de ceux qui, dans le MULT, ont imposé un parti politique qui s’est allié sans pudeur aucune au PRI et au PAN.

La Commune autonome de San Juan Copala est toujours en résistance et plus vivante que jamais, malgré 174 familles déplacées de leurs foyers aujourd’hui occupés par des assassins, bras armés du pouvoir.

Notre principal ennemi en tant que peuples originaires, méprisés et spoliés, est le système capitaliste, dont les mauvais gouvernements nous arrachent ce que nous avons et imposent leur intérêt économique sans que rien d’autre ne leur importe. C’est pourquoi nous appelons à unir et à coordonner les luttes pour l’autonomie, mais en reconnaissant que cette unité est aussi celle des autres luttes d’en bas et à gauche qui existent au Mexique et dans le monde.

Si auparavant nous étions peu, à présent nous sommes plus et bientôt nous serons davantage encore. L’autonomie est notre combat, jusqu’à la mort s’il le faut, mais nous ne permettrons pas qu’on pille nos ressources naturelles. Et c’est pour cela que certains, qui se disent de gauche et qui prétendent s’organiser en luttant contre le peuple, nous disent que nous sommes une minorité, que nous n’avons pas consulté la communauté. En revanche, eux, ils ont imposé leur parti, et nous ne croyons pas qu’en arrivant au pouvoir de cette façon on puisse faire grand-chose ; au contraire nous avons vu chez eux que l’État les domine, les transforme en nos principaux oppresseurs, et qu’ils ne défendent plus les principes et les besoins de la région triqui.

Ils partagent la vision de l’État, des gouvernements de la Fédération et de l’État d’Oaxaca, selon laquelle nous vivons un conflit interne au peuple triqui et qu’on doit dialoguer pour le résoudre. Ils nous appellent au dialogue en même temps qu’ils continuent à nous tirer dessus et à nous assassiner, protégés par le gouvernement, et ensuite ils nous accusent de ne pas vouloir dialoguer. Avant de parler et de nous mettre d’accord avec les communautés, pas avec les dirigeants, nous voulons la justice et le châtiment des assassins.

Nous le faisons ici, et nous le ferons où que nous nous trouvions : nous dénonçons ces groupes criminels et assassins de leur propre peuple, l’Ubisort-PRI et le MULT-PUP. Ce sont eux qui occupent à présent San Juan Copala, mais cela ne nous soucie guère, car ils l’ont fait d’une manière violente, démontrant ainsi leur incapacité politique à convaincre devant le peuple triqui. Notre autonomie vit dans d’autres communautés qui sympathisent avec le projet.

Le peuple triqui vit, et l’autonomie continue !
Un peuple plein de dignité morale, un mouvement plein d’avenir et d’unité !

Bien à vous.

Commune autonome de San Juan Copala
le 24 novembre 2010.

Traduit par el Viejo.

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